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Cultures urbaines et intelligences sémiotiques[1]

Kalidou SY, GRADIS / Université Gaston Berger de Saint-Louis, CeReS / Université de Limoges

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Résumé

Les dynamiques urbaines de par leur ampleur et leur complexité obligent à envisager la ville à la fois comme espace physique et comme espace symbolique. Du point de vue de ses morphologies et de ses mythologies, l’espace urbain articule des langages, des symbolicités et des systèmes sémiotiques retors. Il est donc important de se demander dans quelle mesure les rationalités sémiotiques sont –elles pertinentes pour appréhender les cultures urbaines et essayer d’en saisir les grammaires en tant que modes d’articulation.  D’où la nécessité d’indexer les niveaux de pertinence du processus de construction du sens en même temps que l’ambivalence des frontières et des seuils. Il sera enfin possible d’interroger ces cultures urbaines comme des pratiques et comme des discursivités.

Mots-clefs : Pratiques urbaines, discursivités sociales, complexité, niveaux de pertinence, (inter)sémioticités, production du sens, énonciation. 

 

INTRODUCTION

La ville est devenue au fil du temps l’expression exemplaire d’une mise en situation de configurations hétérogènes suivant l’agencement des temporalités et des spatialités (Maïté Clavel ; 2002). De quelques points de vue qu’on les envisage d’ailleurs, ces espaces - temps urbains déploient, mutatis mutandis, des interactions entre sujets sociaux, entre actants pour faire émerger des valeurs et des modalités de leur circulation. Ils instruisent de nouveaux modes de vivre ensemble, de nouvelles procédures de faire sens, de nouvelles territorialités. Ils engagent de ce fait même et de façon continue une sémiosis sociale singulière. Ces configurations instaurent aussi une dynamique interlocutive entre sémioticités et se donnent à lire radicalement comme sémiosphère, pour reprendre Lotman (Youri Lotman; 1999), comme intersémioticité plus exactement ici. Cependant, l’institution des cultures urbaines à la fois comme paradigme et comme symbolicités dans l’espace-temps urbain intime de lire ces processus comme pratiques sémiotiques stratégiques entendues comme pratiques concurrentes et comme conjonctures (Jacques Fontanille; 2008), et de ce fait même elles se lisent aussi en tant que pratiques procédurales. Le mouvement Hip Hop, dans sa diversité d’expressions (chants, danses, tags et graffitis, pratiques sportives, etc.), occupe une position centrale dans les pratiques urbaines, dans les rituels de réappropriation de l’espace-temps urbain et dans les processus d’institution de sujets actants et d’instances énonciatives.

Dans ce qui suit nous définirons d’abord les cultures urbaines, ensuite nous en explorerons la complexité avant d’indiquer les perspectives anthropo-sémiotiques qui sous-tendent toute cette réflexion.

 

I) Définir les Cultures urbaines

Il faut revenir au syntagme même et distinguer les « Cultures urbaines » de la « Culture urbaine » pour lever un certain nombre d’équivoques. « Culture urbaine » au singulier peut s’entendre comme un ensemble de normes, de règles et de pratiques générées par la ville et qui contribuent en retour à lui façonner un visage, une identité en somme. De ce point de vue alors, la ville est un terrain, un objet surtout pour la distinguer de la campagne et du rural. Quand bien même les « cultures urbaines » de façon générale dériveraient du mouvement Hip Hop, il faudrait entendre par ce syntagme un ensemble composite où se retrouveraient de la musique (rap, slam, danses, etc.), des arts graphiques (dessins, tags, graffitis, etc.), des arts numériques (vidéos, photos, installations, etc.), des pratiques sportives (skateboard, roller street, streetbike, basket de rue, etc.), des performances qui font cohabiter concurremment plusieurs de ces pratiques et probablement un modèle d’architecture et d’aménagement de l’espace qui induit des modalités particulières de vivre ensemble et de faire avec (comme les HLM et les cités assimilables). On peut donc dire qu’elles sont à la jointure de l’artistique, du social et du culturel. On peut aussi, de ce point de vue, définir les cultures urbaines comme un ensemble de pratiques stratégiques prenant place dans l’espace de la ville suivant une démarche d’appropriation et de territorialisation. Appropriation veut dire ici inscription d’un processus de réaffectation des parts dans ce qui est du public, de redistribution dans le commun du communautaire[2] ; et territorialisation fait entendre l’institution d’un protocole de singularisation, des procédures d’émergence d’une altérité. Cette diversité, voire cette hétérogénéité des sujets actants et des pratiques dans l’espace de la ville, fait éclater les approches du fait culturel urbain et des pratiques urbaines. De ce point de vue donc l’expression pratiques urbaines, plus englobante, serait plus appropriée pour désigner ce tout hétéroclite. En réalité d’ailleurs, quand on y regarde de plus près, on s’aperçoit plutôt que la plupart des sciences humaines et sociales procède par segmentation mais toujours en partant de la ville comme fondement, comme base, j’allais dire comme infrastructure. Et les cultures, elles, sont vues comme une superstructure. Toutes ces disciplines s’accordent au moins pour tenir l’espace urbain et ce qui s’y passe comme langages dont il faut décrypter le faire sens.

Dès lors, le qualificatif « urbain » devient un patron productif dans l’élaboration des méthodologies pour analyser la mise en relief d’une des dimensions de cette urbanité: la sociolinguistique urbaine, issue de la sociolinguistique, étudie les variations socio-langagières produites par et dans la ville[3]. Elle ne se focalise pas sur les cultures urbaines entendues au sens du mouvement Hip Hop, elle tente plutôt d’établir ainsi des corrélations entre collectifs, espaces et codes langagiers/linguistiques; la sociologie urbaine  étudie les dynamiques de changement social, les modes de redistribution des statuts et des rôles dans l’espace urbain[4] ; l’anthropologie urbaine, en s’intéressant aux modes de production de l’altérité dans les sociétés contemporaines ne pouvait trouver meilleur terrain que la ville actuelle pour la mise en scène de ses distances et de ses distanciations[5] ; la géographie urbaine tente de comprendre les logiques d’aménagement et d’agencement des espaces et des populations dans la ville et leurs évolutions[6] ; l’urbanisme étudie les méthodologies d’occupation, d’habitation en vue de rationaliser l’espace urbain par la planification[7]; l’architecture s’intéresse à l’immobilier et à la façon dont le bâtis s’intègre dans un système de cohérence fonctionnelle et identitaire[8] ; quant à la sémiotique urbaine, elle s’efforce de rationaliser les modes d’existence des objets et les procédures de production du sens dans l’espace urbain[9], en tant que ces procédures de production du sens relèvent d’abord de la conjonction d’un plan de l’expression et d’un plan de contenu : comment la ville fait-elle sens, en somme ? Mais la sémiotique urbaine elle-même est tiraillée entre la sémiotique de l’espace, la sémiotique de l’architecture, la sémiotique des cultures et la sémiotique des pratiques[10], au moins. On peut donc se demander légitimement si une sémiotique des cultures urbaines est une sémiotique urbaine, une sémiotique des cultures, une sémiotique des pratiques, une sémiotique de l’espace ou tout cela à la fois.

 Les cultures urbaines, elles-mêmes, ne facilitent pas la tâche aux chercheurs parce qu’elles brassent plusieurs pratiques hétérogènes dont les bords extérieurs, au moins, touchent à d’autres disciplines, d’autres configurations, d’autres logiques finalement. Mais, et c’est bien là le fondement de ma thèse, c’est que les cultures urbaines sont foncièrement et fondamentalement des discursivités sociales à l’intérieur de la ville qui est elle-même figuration de systèmes discursifs, d’intersémioticités. Cela entraine au moins deux conséquences méthodologiques : la première oblige à envisager les cultures urbaines comme des pratiques sociales structurées et structurantes, et la deuxième regarde ces pratiques sociales en tant que formes d’expression, en tant qu’ensemble de discours que la société tient sur elle-même comme altérité. Les cultures urbaines sont donc des constructions discursives du social, des configurations discursives du social. On peut alors les interroger suivant une double articulation : suivant la façon dont elles articulent leur propre cohérence, leurs propres sémioticités en tant que niveaux de pertinence d’une part et d’autre part la manière avec laquelle elles s’articulent sur des spatialités et des temporalités déjà là pour organiser des tactiques de détournement, de braconnage. Dès lors, une sémiotique des cultures urbaines est avant tout une sémiotique de l’hétérogène, une sémiotique de la complexité : une anthropo-sémiotique. En tant que discursivités sociales, les cultures urbaines s’inscrivent de façon irrémédiable comme polyphoniques, mieux comme dialogiques ; cette polyphonie et cette dialogie subsument au moins une hétérotopie et une hétérologie qui sont des manifestations de l’hétérogenèse irrémédiable qui structurent les pratiques urbaines. Il afflue dans ces discursivités sociales comme un feuilletage des temps et des espaces, comme une tension entre les niveaux de discursivisation, les lieux d’énonciation et les instances de l’énonciation. 

 

II) Cultures urbaines et complexité

La territorialité est indissociable de la question de l’altérité et des frontières séparant de l’autre et du dehors. On peut donc la définir comme perception de la différence et effet de bornage pour circonscrire un espace physique et/ou symbolique propre ; et il faut comprendre propre à la fois comme propre à quelqu’un, donc approprier (appartenance) et propre pour quelque chose, c’est-à-dire apprêter (fonction). La dimension éthologique reste prégnante dans ses usages en sciences humaines et sociales. On sait la façon dont les philosophes Gilles Deleuze et Félix Guattari, depuis leur Anti-Œdipe (1972), ont popularisé la notion de territorialisation avec ses versants, déterritorialisation et reterritorialisation, pour en faire un processus dynamique et créatif. De ce point de vue, pointer la territorialité dans les pratiques urbaines, c’est indexer ces pratiques comme procédures de subjectivation ou plus exactement de trajectivation, pour reprendre le concept de Berque, c’est-à-dire ce double mouvement de cosmisation de notre corps et de somatisation de l’espace. La territorialité est alors un effet d’occupation et de positionnement, une manière d’affirmation d’une identité, individuelle ou collective, et de la disposer en face d’une différence. Elle est une façon tout aussi bien de se tenir comme différence. Elle est de fait une production de l’altérité. Considérées ainsi, les pratiques urbaines deviennent des procédures de symbolisation, de sémiotisation et en elles –mêmes, des formes de sémiosis. Une territorialité, dans le jeu des pratiques, est donc un chiffrage urbain, une redistribution des codes et des codages pour imposer à la fois une visibilité et une lisibilité autres. Rancière dirait «une redistribution des parts dans le sensible »[11], un repartage du sensible alors. La renégociation des spatialités et des temporalités contribue à faire émerger de nouvelles grammaires du sens. En mettant en circulation des signes et des signaux, en définissant les modalités de leurs usages de communication, de reconnaissance ou de (re)construction de liens, les acteurs en tant que sujets de culture élaborent pour eux-mêmes et pour les autres des modes d’organisation alternatifs. C’est donc du point de vue des procédures de modalisation qu’il faut interroger la territorialisation des pratiques urbaines. L’inscription des pratiques urbaines d’un point de vue praxique et praxéologique reconfigure les univers de sens par un déplacement continu des frontières et des seuils : frontières spatiales, frontières temporelles, frontières symboliques et donc frontières sémiotiques aussi. Ces déplacements autorisent alors des passages entre systèmes de codage, de chiffrage et modèles cryptiques. A l’intérieur du mouvement Hip Hop par exemple, la façon dont les différentes disciplines ou sous disciplines, les diverses pratiques émergent et se différencient progressivement en rap, slam, graffiti, basket de rue, etc., sans jamais cesser d’être à la fois des sous-systèmes et des environnements de systèmes. Chacun de ces micro systèmes ne peut s’analyser qu’en référence au macro système que représente le mouvement Hip Hop tandis que le mouvement Hip Hop lui-même ne se comprend qu’au travers de ses manifestations que sont les micro systèmes rap, slam, graffiti, performance, etc. La différenciation n’est pas une dissociation dans ce cas de figure. On pourrait alors dire d’une certaine façon que le mouvement Hip Hop et plus généralement les cultures urbaines se donnent à lire comme systèmes autopoïetiques et autoréférentiels[12]. La territorialisation s’élabore ainsi dans une autopoïesis continue. C’est pour cette raison d’ailleurs que la territorialité dans les pratiques urbaines ne peut pas s’analyser de façon autonome mais seulement dans ses relations foncières avec son dehors. Et si on veut bien considérer la territorialisation comme lieu d’une praxis, mieux d’une praxéologie, on peut dire que la structure modale ne peut se réduire seulement à une question de pouvoir de la territorialité.

 

III) Anthropo-sémiotique des cultures urbaines

Le paradoxe des pratiques urbaines, c’est qu’elles se disent depuis leur désir de sens ou plus exactement elles s’énoncent comme désir de sens suivant le constat d’une vacuité, d’une rupture et d’une discontinuité dans le faire sens. Si l’on considère la ville comme un ensemble de discours et les cultures urbaines elles-mêmes comme un espace interdiscursif, un espace d’interlocution donc, l’inscription des pratiques urbaines dans la ville met en crise les règles déjà là de production du sens par l’introduction d’une discordance radicale. La superposition de ces espaces physiques et symboliques construits suivant des grammaires différentes, opacifie les ancrages syntagmatiques et paradigmatiques par un brouillage des régimes de sémioticité en œuvre. Par exemple lorsqu’un graffitiste s’empare d’une gare, d’une façade d’immeuble, d’un pont sur une autoroute, etc., il dé-figure l’objet par une désarticulation de la logique urbaine, de la logique des politiques urbaines, pour le trans-figurer littéralement. Un espace en tant qu’objet sémiotique, ne signifie pas seulement par sa cohérence interne mais aussi par la façon dont il s’articule avec ses environnements externes. Du fait même de ce jeu de dé-figuration et de trans-figuration, il se produit dans l’interprétant dynamique (pour parler comme Peirce) ce que j’appellerai l’effet palimpseste qui est une sorte de tension entre le déjà là qui affirme sa présence et l’alors qui n’est plus là mais criant la présence de son absence. Cette tension irrécusable donne à lire le déjà là comme violation de l’alors qui n’est plus là dans la continuité des mémoires et des imaginaires interprétatifs. Les cultures urbaines ainsi s’énoncent comme propositions de faire sens dans l’espace d’interlocution qui prend forme progressivement et de façon irrévocable. Tout espace sémiotique est fondamentalement un espace d’interlocution, une interdiscursivité et une intermédialité donc. De ce point de vue, la coprésence d’une double sémioticité fait sens dans ses oppositions contradictoires-mêmes en se donnant à la fois comme euphorique et dysphorique. Mais cela veut dire aussi que les sémioticités coprésentes ne signifient pas chacune de son côté, séparément, leur processus de production du sens est foncièrement dépendant des procédures d’articulation des hétérogénéités en présence. Il n’y a pas de pratiques urbaines déliées des formes de contestation des logiques urbaines, elles se présentent comme des manières autres de ces logiques urbaines qu’elles remettent en question. En ce sens, l’hétérogène est le mode radical de donation de sens des pratiques urbaines et plus fondamentalement des pratiques sémiotiques de façon générale. Une pratique urbaine en tant que pratique sémiotique est d’emblée une pratique complexe qui intime une sémiotique de la complexité sinon de l’hétérogénéité. On peut faire alors l’hypothèse suivant laquelle que c’est en agissant conjointement sur les spatialités et sur les temporalités pour circonscrire des territorialités physiques et/ou symboliques, que les pratiques sémiotiques en général et les pratiques urbaines en particulier prennent place comme sémiosis sociale pour réinterroger, dans les rituels du quotidien (pour parler comme Goffman), les normes sociales dans l’imaginaire collectif[13].

 

CONCLUSION 

Si la sémiotique est bien une science du sens, une science qui étudie comment les signes signifient, une anthropo-sémiotique ou sémiotique de la complexité enracine cette signification dans la société et dans les interactions symboliques. La rationalité sémiotique, en interrogeant la praxis sociale comme actualisation locale de formes énonciatives par des instances d’énonciation, postule l’immanence du sens et ses niveaux d’appréhension. De ce point de vue alors, ces niveaux d’appréhension peuvent être décrits comme des zones articulées autour de partage de règles de production et de réception, de partage des codes régissant les interactions symboliques.  Ces zones délimitent ainsi des niveaux de pertinence et font de leurs frontières des seuils où se jouent les tensions entre l’intérieur et l’extérieur, le même et l’autre, entre l’ici et l’ailleurs.

Autant il est important alors de déterminer les règles qui gouvernent chaque zone, chaque niveau de pertinence autant il est tout aussi important de décrire les règles de passage d’une zone à une autre, d’un niveau à un autre et qui permettent de justifier ou de légitimer le postulat de l’immanence du sens. Ce qui permet aussi de lire ces zones de pertinence comme articulation de systèmes et comme macro système, selon l’angle d’analyse.

Les cultures urbaines ou plus exactement les pratiques urbaines, en prenant forme dans l’espace de la ville, conjuguent des spatialités et des temporalités discordantes en elles-mêmes pour spécifier, démarquer des micro systèmes ou micro pratiques qui sont en même temps des parcours de sens : faire sens et donner du sens. Le rap, le slam, le street art, la danse, la banlieue comme les cités HLM, etc. permettent de percevoir et d’analyser cette sémiosis sociale en œuvre continuellement pour instruire la communication, a la fois médiation et médiatisation, et la cognition sociale. 

Ce que cette synthèse a tenté de mettre en évidence et de discuter très rapidement, du reste. Une manière d’appliquer aussi les intelligences sémiotiques.  

                       

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[1] Ce texte est une synthèse d’un article déjà paru dans la revue GRADIS, N* 1, Septembre 2015, intitulé “Cultures urbaines et sémiotisation. Point de vue théorique”.  Cette synthèse porte, comme on le constate, un autre titre et d’autres sous titres, pour les besoins de l’intervention donnée lors de la journée sur les cultures urbaines tenue le 15 mai 2016 a l’Université Assane Seck de Ziguinchor.

[2] Rancière, J. (2000), Partage du Sensible, Paris, Découverte

[3] Bulot, T., Bauvois, C. et Blanchet, Ph., sd. (2001), Sociolinguistique urbaine. Variations linguistiques : images urbaines et sociales, Rennes, PUR ; Calvet, L.-J. (1994), Les voix de ville, Paris, Payot

[4] Clavel, M. (2002), La sociologie de l’urbain, Paris, Editons Economica ; Rémy, J., (1987), « Bilans et tendances de la sociologie urbaine de langue française depuis 1945 » In Espaces et Sociétés, N° 48-49 ; Marpsat, M., (1999), « La modélisation des « effets de quartier » aux Etats-Unis. Une revue des travaux récents. » In Populations, N°54, Vol.2 ; Ostrowetsky, S., (1996), Sociologues en villes, Paris, L’Harmattan   

[5] Althabe, G. et Comolli, J.-L., (1994), Regards sur la ville, Paris, Editions Centre Pompidou ; Métral, J., sd, (2000), Cultures en ville ou de l’art et du citadin, La Tour d’Aigues, Editions de l’aube ; Hannerz, L. (1985), Explorer la ville, Paris, Minuit ; Augé, M., (1992), Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, Paris, Seuil ; (1994), Pour une anthropologie des mondes contemporains, Paris, Flammarion

[6] Roncayolo, M, (1990), La ville et ses territoires, Paris, Gallimard ; Harvey, D, (2008), Géographie de la domination, Paris, Les Prairies ordinaires

[7] Choay, Fr, (2006) Pour une anthropologie de l’espace, Paris, Seuil ; (1965), L’urbanisme, utopies et réalités. Une anthologie, Paris, Seuil

[8] Nopen, L, sous la dir., (1995), Architecture, Forme urbaine et identité collective, Laval, les éditions du Septentrion ; Paquot,Th. & Younès, Ch. (2000), Ethique, Architecture, Urbain, Paris, La Découverte

[9] Lamizet, B., (2007), « La polyphonie urbaine : essai de définition », Communication et organisation, N°32 (La ville dans tous les sens), disponible sur http://communicationorganisation.revues.org/1141 (consulté le 19/05/2014)

[10] Hammad, M., (2010), Palmyre. Transformations urbaines. Développement d’une ville antique de la marge aride syrienne, Paris, Geuthner; Fontanille, J., (1989), Les espaces subjectifs, Paris, Hachette; Fontanille, J., (2008), Pratiques sémiotiques, Paris, PUF ; Landowski, E., (2009), « Régimes d’espace », Actes Sémiotiques, en ligne http://epublications.unilim.fr/revues, (Consulté le 19/05/2014); Bertrand, D. (2009), « De la topique à la figuration spatiale »,Actes Sémiotiques, en ligne http://epublications.unilim.fr/revues, (Consulté le 19/05/2014); Zilberberg, Cl., (2008), « Contribution à la sémiotique de l’espace », Nouveaux Actes Sémiotiques, en ligne sur http://epublications.unilim.fr/revues, (Consulté le 19/05/2014); Sansot, P., (1973), Poétique de la ville, Paris, Klincksieck ; Lotman, Y., (1999), La sémiosphère, Limoges, PULIM mais aussi du même auteur (2004), L’explosion et la culture, Limoges : PULIM, Nouveaux Actes Sémiotiques

[11] Rancière, J. (2000), Partage du sensible, Paris : La Fabrique

[12] La sociologie Luhmannienne, de façon remarquable, tente un nouveau paradigme à partir de l’analyse des systèmes sociaux et leurs environnements en partant de la perspective du fonctionnement des organismes vivants. Cf. (2011), Les systèmes sociaux. Esquisse d’une théorie générale, Laval, P.U. de Laval (traduction de Lukas K. SOSOE). Mais c’est plutôt chez Edgar MORIN que la Complexité devient véritablement un paradigme et nourrit une pensée profondément relationnelle, auto-organisationnelle. Cf. (2005), Introduction à la pensée complexe, Paris, Seuil

[13] C’est pour cela qu’il y a un paradoxe inquiétant lorsque les politiques publiques urbaines cherchent de plus en plus à aménager des espaces pour abriter les pratiques urbaines, à organiser des festivals et des expositions dédiées aux cultures urbaines, parce que c’est bien là des stratégies de normalisation, de légalisation de pratiques qui ne s’élaborent que dans la face à face entre la légalité et l’illégalité, entre le pouvoir et sa marge (l’autre radical du pouvoir et du centre). C’est pourtant dans la fabrication de sa marge que le pouvoir se donne comme singularité en produisant de la différence et non dans la normalisation de « l’anormal ».  

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Le Désordre du Discours de la Télévision Sénégalaise: Le Langage “No Stress”

Baye Massaer PAYE, Université Assane Seck de Ziguinchor

 

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La nature même de la communication humaine et du langage – fait social par excellence – conduit ou devrait conduire à une approche intégrée des phénomènes linguistiques. Les approches sociolinguistiques et celles décrites comme relevant de l’analyse critique du discours (Critical Discourse Analysis) sont à l’origine des projets interdisciplinaires revendiquant une méthodologie de recherche plurielle questionnant des actes et pratiques langagières. En conséquence, comme dans le cadre des émissions télévisées, différents acteurs se positionnent en développant un « véritable langage qui évolue au gré de l’imagination et des situations rencontrées » (Schönwasser, 2004, p.44).

Ces nouvelles pratiques langagières des media révèlent des phénomènes interactionnels qui construisent de nouveaux registres dans le cours d’échanges indiquant des « moments linguistiques » permettant de traquer le sens des mots et des phrases en sachant que le langage ne fait que simplement désigner la faculté qu’ont les hommes de communiquer librement. Cette orientation dans l’analyse des pratiques discursives est le plus souvent très présente dans l’analyse du discours médiatique et elle est consubstantielle des courants de la ‘critical discourse analysis’ (voir, en particulier, Fairclough 1992, Van Dijk 1993, Wodak 1996) et développe une « mise en spectacle de l’information » (Charaudeau, 1997).

Cette étude a pour but d’opérer une analyse critique des actes du discours (Speech Acts) des animateurs des télévisions urbaines du Sénégal (Sen TV, TFM, etc) en allant au-delà d’un structuralisme simpliste pour promouvoir et révéler a travers la complexité et la diversité des performances verbales des différents « Speaking Subjects », une multitude de niveaux d’analyse. Les différentes pratiques discursives observées au niveau des Télés urbaines traduisent l’avènement de la « BéguéLect », un ensemble de codes langagiers qui reflètent de nouvelles manières d’être et de penser de la société sénégalaise.

Les animateurs des télévisions urbaines qui symbolisent une nouvelle forme de « psychologue conseillers » nous offrent quotidiennement des « Lépp Scénarisés » qui font la promotion du « Langage Super Bougna ». ‘ Le langage Super Bougna est un langage novateur et provocateur, un code langagier image et pourvoyeur d’une sémantique plurielle. Le néologiseur ressemble souvent a son invention, les acteurs des télévisions urbaines reprennent les pratiques linguistiques des jeunes, des comédiens, des danseurs et des lutteurs. A travers ces scenarii, les media construisent de nouvelles pratiques langagières et de nouvelles identités.

  

  1. Et Si on refusait d’être des Gérrs : La Sargalomania et les nouvelles formes de marketing (Gereum)

L’enjeu de l’acte de langage ne se trouve pas tant dans son explicite (langue) que dans l’implicite (discours) qu’il véhicule. Cela nous amène à constater que tout acte de langage a, de façon constitutive, une double dimension explicite et implicite, indissociable l’une de l’autre. Et l’on peut se demander à quoi tient cette différence entre ce que l’on pourra appeler une sémantique de langue qui se trouve catégorisée et répertoriée dans les grammaires et les dictionnaires et une sémantique du discours qui ne s’y trouve pas ?

On répondra, dans un premier temps, que cette différence est due à la prégnance du contexte dans lequel s’insère l’énoncé. Mais, qu’est-ce que le contexte ? Car, ici, il ne s’agit pas seulement de ce qui constitue l’environnement linguistique immédiat de l’énoncé considéré (ce qui le précède et ce qui le suit). La télévision peut être envisagée comme une société du spectacle mettant en œuvre des codes langagiers qui doivent attirer l’attention des récepteurs tout en les informant a travers des indices de divertissements imaginatifs.

Il s’agit, ici, d’une situation d’énonciation qui nous oblige en tant qu’analyste à nous interroger sur l’identité de celui qui parle (l’animateur) et sur la finalité de l’échange qui détermine l’enjeu de signification de l’échange langagier. En outre, il nous faut mobiliser un savoir culturel et social allant au delà du contenu de ce système linguistique, mais aussi celui contenu et véhiculé par un ensemble de discours qui ont été produits par le groupe social auquel appartient le sujet parlant. Par exemple, dans les énoncés suivants « Géeweul yi ñoyy étuwalu  réew mi », « Domu Guéweul La », « Maane sama askaan moyy guéweul »,  « Samba Mbayaane. », on ne pourra inférer l’implicite ou la revendication d’un capital culturel et linguistique selon les termes de Pierre Bourdieu que si l’on sait qu’un animateur télé, selon le registre communicationnel qu’il pratique, veut s’identifier a un groupe social spécifique (Les griots). Ces maitres de la parole qui encense, la parole qui exagère, la parole qui éblouit, ont su développer une activité langagière mobilisant pas seulement une mémoire linguistique, mais également une mémoire situationnelle et discursive.

S’agissant du signe, on sera amené à distinguer, dans un rapport de complémentarité, un signe linguistique de langue et un signe linguistique de discours. Le signe linguistique de langue, est investi de sens par un contexte linguistique qui doit assurer une réalité du monde dont il construit la signifiance. Le signe linguistique de discours se définit selon une double dimension : situationnelle, car il dépend pour son sens des composantes de la situation de communication, inter discursive, car son sens dépend également des discours déjà produits qui constituent des domaines de savoir normés.

A travers ces signes linguistiques de discours, les acteurs télé, promoteurs de la société du spectacle, profitent de cet univers télévisuel pour remercier leurs marabouts, leur habilleur, leur coiffeur, leur patron et ceux qu’on identifie comme des ‘Kilifeu’. Selon, l’animateur télé doit comme le dirait Pape Cheikh Diallo « remercier Kom Nuka  ñepp di déffé » car il se considère comme un ‘domu géweul’ même s’il est un ‘geer’ (noble) ou plutôt un ‘géer boo yakoo’. C’est seulement l’apogée de la sargalomania pour ne pas dire le ‘Samba Mbayaane’. Au niveau des télévisions urbaines, c’es tous les jours l’anniversaire de quelqu’un, en particulier un V.I.P (very important person) et il faut tout le temps remercier son Boss ou son marabout. ‘ñii  ngui geremm Serigne abbo bu serigne Fallu’,  ‘ñii ngui  ñanaal  Youssou Ndour, Bouba  Ndour’, ‘Bougane  Samma Patron Kena dou Momm’, Ma nguiyy Sargal Boss bi’, ‘ Sargal smma Yayoo bopp’ puisque ‘kuu Limm Juum’.

Il faut toujours remercier ses bienfaiteurs car comme disait l’autre ‘Ki Samma  xaritt la,  ‘Té Ma koyy yokoo buzz’. En tant qu’animateur télé qui se respecte, il faut toujours ‘sargaliser’ une grande dame qu’on appellera ‘samma yaye’ ; celle-ci est d’habitude une grande diva ou commerçante et elle habite en Europe ou dans le pays de Donald Trump, la société qui banalise la tromperie et l’érige en vertu. Donc si on vous dit ‘Koyy Tagoo ? Koyy Begue ? Vous repondrez ‘samma yaye’, ‘samma tailleur’, ‘Samma coiffeur’, un nouveau membre de la Jet Set, ou ‘samma serigne’.

 

2. Et si Freud avait raison : Une Nouvelle Construction sociale de la Sexualité

Au niveau des télévisions urbaines du Sénégal qui ont tendance à développer une nouvelle scénologie du spectacle, on peut déceler de nouveaux codes langagiers qui énoncent des actes du discours mettant en valeur ce qu’on appelle la ‘civilisation du Assalo Assa Bombé’. Ce nouveau langage urbain est le symbole de nouvelles pratiques et croyances sexuelles banalisées et légitimisées par une nouvelle intellligentsia sociale, celle des acteurs et animateurs télé.

Ces nouvelles expressions sexuelles développées par les jeunes et reprises par les animateurs mettent en avant des énoncés linguistiques révélateurs de nouveaux comportements et croyances débridés. ‘Soll Toobayy’, ‘Déff Bodi’, ‘Soll Ba’, ‘Patchial sayy wénn’, ‘Déffar ba moo baax’, ‘tabax bamoo kaawé’, ‘Maane féssagooma bayy toouru’ , ‘Xalé boo Toyy’,  ‘Xalé boo Sexy’. Ces expressions imagées symbolisent l’avènement de la nouvelle femme sénégalaise, une femme libre, maitresse de son corps et désireuse de la mettre en valeur par tous les moyens a travers une recherche perpétuelle d’amants ou de maris imaginaires. Cette femme est toujours a la recherche de compliments mielleux et la gente masculine est prompte a lui déclarer que ‘Yaa koy daggaté’ ( you are the one) pendant que celle-ci répond ‘Maane féssagooma bayy toouru’.

Cette réponse très sexuelle a un sens péjoratif voire vulgaire. Cette femme, maitresse de son corps a suffisamment de moyens pour mijoter de petits plats comme amuse-gueule, elle n’a pas envie d’un homme et est sexuellement satisfaite. C’est pourquoi elle dira à tout le monde ‘Loo ma namma togàntuko’ ‘yako téré nekh’, ‘Mayy bombe’  pendant qu’elle mettra en valeur ses atouts physiques’ Déff sooñu Bax’ en espérant avec contradiction que l’homme lui dira ‘Ya maay daanél’. En plus, une femme doit être belle et sexy ‘Djiguénn boo bax da ngayy amm ñiex’ et elle pourra envisager d’avoir librement des rapports sexuels même en dehors du mariage ‘Loomoonul  ñiakk faaw moo aam’.

Donc, elle peut dire librement ‘ koo mayy teul , kooy tass samma cheveux’,’ Kooy teul samma perruque’ ?’Si elle n’est pas encore mariée, elle pourra savourer l’idée qu’elle a des prétendants en chantant comme Coumba Galo Seck ‘Amna koo nekk si raang bi. Aam na kuyy feugg’. En attendant le ‘Godot charmeur’, la femme qui a des rapports sexuels débridés se fera appeler ‘Diankou Pharmacie’ car elle aime prendre des pilules pour éviter de tomber enceinte. Cette ‘Diankou Pharmacie’  qui aime aller en boite de nuit, s’amuser en gardant sa liberté, danser sous la musique de Wally Ballago Seck ‘Gooney Wally Yé’ en risquant d’être appelée une ‘Koba’, une fille sexy qui n’a peur de rien, une allumeuse qui doit éviter le ‘Waari’ (predateur), celui qui applique la philosophie sociale du ‘Vitefait bien fait’ car ce n’est pas un ‘Goor Yaye Mayy ma   ñiex’ ; il a l’habitude de bifurquer et de draguer les filles en pratiquant le  ‘djadee koñe’ et il aime les filles qui regardent Yama de la Sen TV en pratiquant le ‘Raacc’ (To chill en Anglais) couplé au ‘Déff loo bonn’. Cependant il demeure une grande différence entre les femmes ‘ÑUUY  DÉMM ‘ et les femmes ‘ÑUUY  MAANOO’ tout en ne voulant pas être des ‘Tatoo Bol’ (quelqu’un qui se contente des restes, une fille qui sort avec un homme qui a une ou deux femmes), elles ne veulent pas finalement renoncer a leur sexualité.

Toutes ces expressions ‘virtuemes’ sont porteuses, virtuellement, d’un sens qui ne s’est pas encore exprimé (le virtuel s’oppose au réalisé) et dont l’apparition se trouverait justifiée par la potentialité sémantique dont il est porteur du fait de ses multiples emplois. Ainsi, si « koba » peut signifier "gazelle" ou "une vieille prostituée ; ce terme comme tant d’autres est directement porteur de sens pluriels (une fois de plus on ne pourrait les répertorier dans un dictionnaire) car ces mots ont dans leur sémantisme des traits qui —sans être explicites— sont potentiellement disponibles dans le marche culturel et linguistique sénégalais, ce qui leur donne la capacité d’« accueillir » des sens non prévus qui sont apportés par un contexte interdiscursif.

C’est aussi cette virtualité qui permet d’expliquer l’évolution du sens des mots. Comment est-on passé de « Tchagga » à « koba » ? C’est donc bien par le biais de cette virtualité propre à la société du spectacle que s’établit un lien potentiel entre sens de langue et sens de discours à condition d’admettre cependant que cela ne se fait pas nécessairement par continuité. C’est plutôt que le sens de discours se développe à travers les savoirs enfouis dans notre inconscient culturel et linguistique qui se construisent dans la pratique sociale, il se trouve ensuite comme "inoculé" dans le registre linguistique de l’animateur télé qui après quelques hésitations finit par l’accepter, voire l’intégrer au point, peut-être, de se l’approprier et de le légitimer.

 

3. Le Langage Super Bougna : KHANA NEX ?

Imaginez in dialogue virtuel entre Abba (Sen TV) et Pape Cheikh Diallo (TFM) qui sont des animateurs hors pairs ayant de nombreux sponsors et téléspectateurs qui adorent leurs codes langagiers et vestimentaires et qui les considèrent comme des références culturelles. Selon Abba No Stress, ‘Daraa Xéwool’ et il n’y a pas lieu de s’inquiéter car dans ce Sénégal nouveau tout va bien malgré la crise économique et la perte des valeurs morales. Il faut simplement faire du ‘Raay’ (ne pas aller droit au but) tout en faisant croire aux sponsors qu’il vaut mieux ‘Wax Tooti dieuf loo bari’ sinon le téléspectateur dira que l’animateur ‘Daffa planké’ (il ne sait plus quoi dire) et celui-ci lui rétorquera ‘Xana Nex’. Abba tout en rejoignant la cuisine dira à Yama tout en reprenant la chanson de Wally Ballago Seck ‘kooy teul sa perruque ?’  Ou bien veux-tu faire du ‘Laalal Bassaang’ ?

Si Yama a envie de faire les deux en même temps, Abba lui dira tout simplement « Lii mo daak nex » en faisant un clin d’œil au sponsor majeur (Sargalexxx) en sirotant une boisson XXXX ou en faisant la promotion d’une société de transfert d’argent. Avec ce langage ‘with no stress’ on aura envie de dire ou d’expertiser ces nouvelles tendances langagières reprises par toutes les sociétés de la place comme la Sonatel, Tigo, Waari, Jooni Jooni en se demandant ‘looy tendance bi’ ? En cherchant la réponse on a une envie folle de rester cloitré à cette vitrine télévisée représentant la société du spectacle car dans cette arène ou ‘keur gui’ on réalisera que ‘keur gui Xamnee daara douffa diekh’ car les sponsors de ces shows télévisés nous font croire que ‘Keur gui oobil  ñañoo ko nieup ñepp’ .

Ces animateurs en faisant des clins d’œil quotidiens à leurs sponsors font de même avec leurs amis chanteurs en louant leurs capacités vocales et financières tout en nous répétant que ‘Balla   ñooy  Xooss di Ibbi Bennenn  Pakeett bou bess (introduire un nouveau thème selon Deguene Chimere de la TFM dans son émission Waaref) on doit dire a son invite du jour ‘Yoo Raffett yi may deff’ et pourtant je ne suis pas un ‘Djayy Taar’ (frimeur) ; je veux juste que mes téléspectateurs soient contents et je leur donnerai volontiers le numéro de téléphone de mon coiffeur et de mon tailleur. Selon les circonstances l’animateur veut faire savoir aux téléspectateurs que ‘Doo Yomba dee’ pour reprendre la rhétorique des ‘Balla’ et consorts et en même temps leur rappeler que les sponsors (habituellement les sociétés de transfert d’argent) offrent des cadeaux en continu pour dire simplement ‘Kooñoo ko Rimbaax niou Timbaax la ko’.

Dans le même ordre d’idées, certains animateurs de ces télés urbaines sont de véritables stars et leurs amis promoteurs de combats de lutte ont un plaisir réel en leur disant s’ils ont le vent en poupe, ‘Abba’ ou Becaye, ‘Amnga Drapeau’, c’est donc le grand jour et il faut faire appel aux sponsors. Mais pour conclure on pourra dire simplement que ‘Yi ayy Facon wou kheum la’. Le langage Super Bougna est fait pour plaire à tout le monde. ‘Xana Nex, Xana Xemm Nga’ ? Ndieme ne dira pas le contraire. Pour le moment, je m’excuse pour ces tribulations langagières. Je ne saurais qu’imiter Mamy la Linguère dans l’emission Waaref et dire avec sagesse ‘Ma demm yoboo Nouyo déloossi’, n’est-ce pas Youssou, car ‘Koo yokk Tcheree dolli  ñiex’. Décidément avec le groupe ‘Keer Gui’, Tayy  ñioo Tocc Fii’ pour reprendre les mots de Ahmed Aidara. XANA NEX.

Ces nouveaux codes langagiers représentent une stratégie de marketing que certains annonceurs ayant leur propre agenda et voulant augmenter leur chiffre d’affaires autant que possible et donc vendre plus, introduisent dans cette lucarne magique qu’est la société du ‘Béggé. Ingrid Piler a trouvé les mots justes pour décrire ce phénomène social en précisant que

the commodification of language largely examined how languages are exploited for consumerist purposes, including selling to target populations; Youth language is commodified for consumerist purposes, as it appears in advertisements for products geared toward the upwardly mobile, educated young adult population with means (Piller, 2001, p.153)  

Cependant, la cible première est la tranche d’âge des jeunes qui consomment les produits proposés. Ainsi, pour les atteindre plus facilement, il est important d’utiliser leur langage afin de les amener à s’approprier le message. Comme le dirait Mnaye Dieye Faye, en faisant un clin d’œil à ‘Kadi’, ‘Saff, Séll, Té Wor, Xana Nex’. Que Vive le Langage Super Bougna.

 

BIBLIOGRAPHIE

-   Charaudeau, Patrick 1997. Le discours d'information médiatique. La construction du miroir social, Paris, Nathan / Institut national de l'audiovisuel (coll).

-   Fairclough, Norman, 1992. Discourse and Social Change. Cambridge, UK. Polity Press.

-   Piller, Ingrid, 2001. Identity constructions in multilingual advertising Language in Society, Volume 30, Issue 2  April 2001, pp. 153-186 .

-   Schönwasser, Marianne. De la jactance à la tchatche. Le monde de l’éducation. N° 324, avril 2004, p.44.

-   Van Dijk 1993. Society, cognition and discourse: In Chinese, collection of articles translated from English). Beijing: China Book Company, 1993.

-   Wodak, Ruth, 1996. Disorders of Discourses. London: Longman.

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Mode vestimentaire en milieu urbain, éthique et esthétique : Montengón, le Rousseau de l’Espagne des Lumières

Dame DIOP, Université Assane SECK de Ziguinchor

 

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Résumé

Le propos de cette communication vise à démontrer que le phénomène de la mode a toujours existé et ne fait que se réactualiser de manière cyclique depuis l’Antiquité à nos jours. De la pelisse (vêtement en peau d’animal) simple du primitif qui vivait de la nature « pure vierge », à la peau d’animal travaillée et bien ornée pour attirer l’attention des autres, du primitif qui perdait beaucoup de temps à confectionner ses propres vêtements, en passant par le mode vestimentaire clinquant et luxueux en milieu urbain au XVIII e siècle, nous essayerons de décrypter les dérives de la mode au sein de la société sénégalaise, grâce à la pensée de deux écrivains philosophes, romanciers, dramaturges, en l’occurrence Rousseau et Montengón.

La philosophie de Rousseau contre les habits de la mode qui font perdre à l’homme sa liberté et sa commodité nous servira de base pour expliquer le récent scandale dans le monde du show-biz, causé par un accessoire de femme porté par un jeune chanteur, sans oublier le mode vestimentaire de la jeunesse en milieu urbain, sous l’angle de la mondialisation en passant par Montengón, le Rousseau des Lumières de l’Espagne. D’autant plus que le bestseller du roman de ce dernier intitulé Eusebio (1786) est considéré par les critiques littéraires comme l’Émile espagnol. Dans El Mirtilo (1795), le protagoniste Mirtilo préfère la campagne à la ville (la Corte) en troquant sa tenue de ville contre une pelisse, à l’aune des primitifs qui vivaient de la nature « pure vierge ».

 

Introduction

L’homme peut-il se libérer d’une société lestée par la culture de masse, régie par le mimétisme qui touche son corps, considéré par Rousseau dans ses écrits comme la partie la plus intime de l’être humain, enclin à se vêtir avec tantôt des habits de luxe, tantôt avec des habits serrés, qui sont surtout aux antipodes de son choix personnel, et encore plus de la commodité ? Déjà au XVIIIe siècle, Rousseau (1717-1778) qui est considéré par Kant comme le « Newton du monde moral »[1],  propose tour à tour de réformer les mœurs, les institutions politiques et sociales, le droit et même la religion. C’est ainsi qu’en plein siècle des Lumières[2], Jean-Jacques Rousseau proteste avec véhémence contre le progrès des sciences et l’accumulation des richesses, contre une société oppressive et des institutions arbitraires. Pour éviter à ses contemporains de courir inévitablement vers la « ruine », il les conseille de retourner à la « simplicité naturelle », voire à la « nature pure vierge », quitte à préconiser finalement la solution extrême qui est la nudité, à l’aune des hommes de l’Antiquité.

 Toutefois, le projet de Rousseau n’est pas antisocial,puisqu’il ne vise qu’à définir une nouvelle socialisation[3], où l’individu sera libre dès la naissance vis-à-vis de son entourage immédiat. Autrement dit, il y aura un lien social qui permettra au groupe de respecter l’individu, qui respectera à son tour l’individualité des autres.  Bref, le culte du mimétisme est rejeté par Rousseau, grâce à des concepts philosophiques génériques qu’il a même réussi à traduire en actes dans la vie quotidienne, voire dans ses écrits.

             Il faut rappeler qu’au XVIIIe siècle la campagne servait de contrepoint à la ville. C’était une manière de mieux faire ressortir les défauts de la ville, où régnaient tous lesvices ou dépravations des mœurs pour reprendre le vocabulaire rousseauiste, contrairement à la campagne qui symbolisait la tranquillité et la paix. En atteste l’œuvre de Fray Antonio de Guevara[4] (1480-1545) déjà publiée en 1539 et intitulée Menosprecio de corte y alabanza de aldea (Mépris de la ville et éloge de la campagne) afin d’inciter les Espagnols à profiter des merveilles de la campagne, en cultivant la terre et en menant paître le bétail, au lieu de rester oisifs en ville, au moment où les travaux manuels[5] avaient été bannis. Cet éloge de la campagne à travers les travaux manuels était une satire contre la noblesse de sang, au profit de la noblesse de mérite. Dans son chef-d’œuvre Eusebio (1786), Pedro Montengón (1745-1824)  fait l’éloge des travaux manuels, véhiculant ainsi un discours économique et une satire contre la noblesse oiseuse et prétentieuse[6].

Le jeune noble et protagoniste de ce roman didactique, Eusebio, est confié à un précepteur (Hardyl) par sa famille adoptive en Pennsylvanie, suite à un naufrage ayant causé la perte de ses parents. Ainsi cette éducation de son maître quaker[7] (Hardyl), basée sur la vertu naturelle, lui  permet d’apprendre à tisser des paniers afin de devenir un artisan modeste, humble, bref vertueux[8]. C’est la religion naturelle sur fond de quakerisme[9] qui prédomine dans ce roman de Pedro Montengón (1745-1824).

            Les principales sources d’inspiration de cet écrivain espagnol d’Alicante sont Rousseau, l’abbé Raynal et Marmontel[10]. La différence entre ces trois écrivains est que Montengón n’était pas foncièrement contre la religion et encore moins pour la critique radicale de la bourgeoisie, à cause de ses origines nobles : il avait la pensée bourgeoise, sa classe sociale. Même si Pedro Montengón n’était pas pour la destruction de l’Ancien Régime, la vertu naturelle préconisée dans son roman didactique, Eusebio (1786), fustige l’ostentation et préconise la modestie et l’humilité[11]. L’habillement des quakers est capital dans l’éducation de ce jeune homme innocent. Il s’agit de vêtements extrêmement simples et sobres pour éviter tout luxe inutile[12].

Par conséquent, ces topiques pourront nous permettre de mieux saisir certains phénomènes de la société contemporaine qui ne font que se répéter de manière cyclique, que ce soit au XVIIe, au XVIIIe ou aujourd’hui. La mode, qui est inséparable du luxe en plus d’être un frein à l’éducation, engendre inéluctablement les vices de l’ostentation et de la vanité, selon Rousseau. D’où la réactualisation du roman didactique et l’apparition des traités sur l’éducation tout au long du XVIIIe siècle en Europe dans la perspective de ramener les gens à la raison. Quant à la société contemporaine, la mondialisation[13] a plus ou moins entrainé l’homogénéisation ou l’uniformisation des cultures du monde qui ne cesse de devenir un « village planétaire »[14], aux dépens d’une jeunesse victime de manière inconsciente de la mode et des lois du marché.

            Enfin si Paris incarnait aux XVIIe et XVIIIe siècles la capitale de la culture et de la mode en tant que ville lumière de par son hégémonie[15] dans le monde, les États-Unis dominent aujourd’hui culturellement le monde en étendant leurs tentacules sur toute la planète. Rien qu’en voyant le mode vestimentaire de la plupart des jeunes gens citadins du pays, l’image de l’accoutrement des rappeurs américains saute aux yeux comme un faisceau de lumière. Mais, le récent scandale dans le showbiz sénégalais avec l’affaire des sacs de femme exhibés par un jeune chanteur[16] a immédiatement suscité l’indignation de la quasi-totalité du peuple. Une chose est sûre, ses habits serrés et les couleurs vives calqués sur le modèle des femmes ne cessent d’accréditer la thèse de ceux qui le taxent d’efféminé, voire d’être financé par des « lobbies ». Bref, le propos de cette communication visera donc à démontrer sur le plan éthique et esthétique si des habits qui deviennent vite obsolètes et évanescents, de surcroît imposés par la mode et surtout achetés de manière inconsciente ou consciente sont utiles ou pas, en se basant sur la philosophie des Lumières.

            Deux parties constitueront l’article, en l’occurrence le mode vestimentaire du XVIIIe siècle et le mode vestimentaire à l’époque moderne. Nous verrons dans un premier temps la mode chez Rousseau, en rapport avec la liberté et l’utilité, l’expérimentation de l’esthétique utilitariste du vêtement, avant d’aborder les idées rousseauistes de Montengón dans l’Espagne des Lumières. Dans un second temps sera abordé le mode vestimentaire à l’époque moderne en prenant l’exemple de la société sénégalaise de plus en plus secouée par les vagues de la mode en passant par le show-biz et les cités religieuses.

 

I. Le mode vestimentaire au XVIIIe siècle : éthique, vanité, ostentation, beauté et utilité

1. Le mode vestimentaire dans l’œuvre de Rousseau : liberté et utilité

La liberté est fondamentale dans la pensée de Rousseau[17]. Il s’agit entre autres de la liberté d’être, de penser et d’agir à partir de soi-même. Ce concept abstrait de la liberté est expérimenté dans Émile (1762) et La Nouvelle Héloïse (1761). On y voit qu’être libre est, selon la philosophie de Rousseau, le fait de rester soi-même pendant les différentes étapes de son évolution. Autrement dit, la liberté est dans ces deux romans un fait quotidien appliqué à la vie et non pas un concept philosophique abstrait, lointain, éloigné des réalités de la société. Ainsi Rousseau a-t-il mis en scène l’homme et sa propre image esthétique en fonction des valeurs politiques et morales de la communauté. Au lieu de nous libérer, le vêtement imposé du dehors ne correspond plus à sa fonction, occasionnant ce que Rousseau appelait « la seconde peau perverse ».

A travers ces critiques et les propositions alternatives, Rousseau voulait tout simplement présenter un projet global de réforme du monde occidental, grâce à la politique, à l’éthique et à l’esthétique du vêtement[18]. C’est surtout le vêtement des enfants et des femmes qu’il analysait sous l’angle de la dimension utilitariste, contrairement à la vanité décorative du rococo, en vue de vulgariser sa philosophie basée sur la liberté et la beauté. Le vêtement et l’utilité nous ramènent d’abord à l’évolution complexe de la mode versatile et excentrique entre la Renaissance et le Rococo, où la pensée néoclassique cherchait une relation plus utilitaire avec la manière de s’habiller. Il s’agissait avant tout d’une exigence sociale qui a finalement abouti à l’éclosion de propositions esthétiques mises en pratiques par Rousseau vers la fin du XVIIIe siècle.

Cependant les arguments les plus consistants de l’utilitarisme provenaient de l’Écosse avec notamment David Hume et Adam Smith. En 1762, date de la parution de l’Émile et du Contrat social, Henry Home publia Eléments de criticisme définissant ainsi la notion de « grâce » (d’élégance et de charme) en rapport avec l’être humain en mouvement. Autrement dit, le vêtement pouvait permettre ou empêcher l’action[19]. Dix ans avant le discours de Rousseau, Hume a publié son Traité de la nature humaine, où il présentait l’esthétique utilitariste la plus convaincante du siècle couronnée en 1751 par la publication de la Recherche sur les principes de la morale régissant la réforme utilitaire du vêtement. Selon Hume, les postures, les mouvements faciles et libres sont toujours beaux[20]. C’est une manière pour lui de faire l’éloge des habits beaux qui ne doivent pas alourdir le corps et encore moins l’emprisonner. 

Rousseau s’est distingué par ses théories, mises en scène dans ses romans, et surtout dans sa vie quotidienne, pour jouir de la plénitude de sa liberté face au mimétisme et aux conventions qui régissaient la société du XVIIIe siècle.

2. Rousseau : l’expérimentation de l’esthétique utilitariste du vêtement

 

Même si les théories de l’éthique et de l’esthétique du vêtement étaient déjà abordées par des philosophes anglo-saxons, Rousseau était celui qui les a expérimentées dans ses écrits et même dans sa propre vie. En 1782 lors de la représentation de son opéra, Le Devin de village, devant le roi à Fontainebleau[21], il s’est habillé comme un rustique (paysan, campagnard). Cette scène est racontée dans les premières pages de ses Confessions, une manière de construire un véritable symbolisme par à rapport à son accoutrement, qui était à l’opposé des habits portés à la cour royale, où prédominaient la mode et l’élégance.

Rousseau s’y est rendu avec sa tenue habituelle, débraillée, barbe mal rasée et cheveux mal peignés. Cette apparence peu soignée a été un acte de courage, parce qu’il était entouré de personnes richement habillées, dans une tribune où tout le monde le voyait. N’ayant pas voulu suivre la mode, il s’est habillé comme d’habitude pour éviter de se soumettre un tant soit peu à l’opinion d’autrui qui aurait risqué de lui faire accepter plus tard tout, sous prétexte d’être toujours lui-même et de ne pas avoir honte nulle part de se vêtir conformément à son choix.

3. Montengón, le Rousseau des Lumières

 

Quant à Montengón (1745-1824), la modération et l’humilité sont des thèmes qui caractérisent l’ensemble de ses héros romanesques, à savoir Eusebio, Eudoxia, Mirtilo, Antenor, excepté l’anti-héros Rodrigo perdu par l’ambition et les vices de la corte. Mais l’épisode de Paris dans Eusebio (1786) est édifiant, puisqu’Eusebio a failli être piégé par le Lord Som pendant la visite au bordel. Ce dernier réussit à lui faire troquer son habit de quaker contre une tenue luxueuse, élégante, afin de le voir se perdre facilement dans la luxure[22]. Le luxe et l’élégance sont des vices qui l’exposent aux déesses de la beauté et de l’amour[23], même s’il réussit in extremis à s’en sortir grâce à la vertu que son maître Hardyl lui avait inculquée.

            Appelé l’Émile espagnol par les critiques littéraires, Eusebio (1786) de Pedro Montengón est la représentation la plus définitive et la plus conséquente du rousseauisme radical, anthropologique et éducatif en Espagne[24]. Libéré de tous les vices qui opprimaient l’individu partout en Europe lors de son périple (Pennsylvanie, Angleterre, France, Espagne), Eusebio est l’incarnation du héros positif, pétri de vertu naturelle, éloigné des conséquences néfastes de la corruption, de la passion, de l’ostentation et de la mode. La vertu de son éducation prime sur les vices du progrès de la société européenne, qui font perdre à l’individu sa liberté.

La spécificité de Pedro Montengón (1745-1824) est qu’il ne rejette pas la civilisation contrairement à Rousseau dont l’élève (Émile) est coupé du monde en se réfugiant dans la nature[25]. C’est pourquoi Rogelio Blanco affirme qu’Émile s’accommode des normes de la vie alors qu’Eusebio devra le faire en fonction des endroits où il se retrouve.  L’Émile espagnol ne cherche pas la nature, mais il l’utilise comme contraste et alternative dans la mesure où Eusebio et son maître Hardyl vivent ensemble tantôt dans la campagne, tantôt dans la société. Cette éducation lui permet de résister, voire de se détourner des frivolités de la vie quotidienne[26]. Dans un autre roman aux allures historiques (El Rodrigo), le narrateur relate la fuite vers l’Afrique d’Evanio qui s’installe d’abord dans la campagne, sur une vaste étendue en friche afin de la cultiver[27] en se débarrassant de ses riches vêtements et de ses parures pour se mettre dans la peau d’un berger vêtu d’un habit humble et rustique[28]. S’ennuyant dans le luxe et la richesse des ornements du palais de Tolède[29], Florinda se rend à la campagne pour profiter[30] de la nature libératrice, contrairement à la corte[31] (la cour royale) où elle se sent en prison. La campagne paradisiaque sert aussi de contrepoint dans cette séquence où la ville reste invivable et infernale pour Florinda. Dans son roman pastoral (El Mirtilo), Pedro Montengón préconise le retour à la campagne à travers la déception du personnage principal qui peine à décrocher un travail à la capitale, juste après ses études en Italie. Préférant ainsi le travail de berger à la vocation de poète à la cour, Mirtilo quitte la ville et rencontre un groupe de bergers qui se dirigent vers l’Estrémadure[32]. Leur rencontre est facilitée par une chanson consacrée à l’inconstance des richesses et du mépris de la corte.

La campagne renferme les valeurs positives, la vertu et la sensibilité[33]. C’est uniquement dans la campagne qu’il peut y avoir cette vie innocente et tranquille, le paradis recherché par presque tous les écrivains, à savoir Gillemán, Rodríguez de Arellano, Zavala y Zamora, Montengón. Selon Joaquín Álvarez Barrientos[34], Montengón s’installe dans le courant qui valorise la vie à la campagne aux dépens de la vie en ville, comme ce fut le cas dans Eudoxia (1793). Pour lui, la leçon de Rousseau est évidente.

Dans sa thèse de doctorat[35], Marc Marti soulève le thème de l’envers du décor en analysant le contraste saisissant entre la misère paysanne et le luxe urbain[36]. Il s’agit d’une satire qui s’attaque au rapport de production (opposition seigneur/fermier). Le luxe permet de révéler l’injustice de la répartition de la richesse[37]. Le paysan croupit dans la faim, voire dans la misère, au moment où le courtisan s’empiffre et se perd dans le luxe, carrosses, théâtre, courtisanes, pierres précieuses, meubles chinois[38], etc.

D’une manière générale, les écrivains du XVIIIe siècle sont contre la mode et le luxe qui peuvent engendrer le manque de liberté et de choix, voire l’éducation dans la société. Ce sont pour eux des vices qui favorisent les apparences trompeuses, la superficialité, le masque, la vanité et la trahison, sans oublier la dépravation des mœurs au sein des villes.

Aussi Rousseau a-t-il créé un modèle pour les futures générations, à savoir la manière de vivre comme un primitif dans la société moderne, grâce à la négligence et à la rupture de la convention[39]. Autrement dit, la mode est atemporelle puisqu’elle existe dès l’antiquité en se réactualisant de manière cyclique jusqu’à aujourd’hui. Si nous prenons par exemple le cas de notre pays, nous nous rendons compte que le mode vestimentaire de la jeunesse est régi par le phénomène de la mode qui engendre ce que Rousseau appelait les noires mœurs de la ville[40], ou plutôt les mœurs légères de la ville.

Déjà au XVIIIe siècle, Rousseau décriait les vêtements serrés, que ce soit des hommes ou  des femmes. De plus, il y avait des hommes qui s’habillaient comme les femmes, en mettant des habits de couleurs vives. Et ce n’est pas une nouveauté lorsqu’un jeune chanteur sénégalais affirme sur TV5 qu’il adore la mode et qu’il en est victime en arborant un sac à main de femme. Un geste qui a fait pleuvoir sur lui une pluie de virulentes critiques, à cause des tabous, car on ne peut pas tout faire au Sénégal, selon lui avant de s’excuser publiquement.

 

II. Le mode vestimentaire à l’époque contemporaine : le cas du Sénégal à travers la mondialisation

  1. Le Sénégal et les « scandales » de la mode dans le show-biz

On ne peut pas tout faire quand on est artiste. Ils confondent des fois la personnalité et personnage. Je ne fréquente pas les homos, je ne sais pas ce qu’ils font. Chez nous, c’est interdit les homosexuels. J’ai fait clore le débat en déchirant le sac. J’adore la mode, j’aime m’habiller en italien (costumes de couleurs). J’adore les fringues, j’adore les belles voitures, j’adore me faire beau.

Wally Seck sur TV5 Monde dans L'invité, le 8 févr. 2016[41].

Dans le monde actuel, il y a des hommes qui s’affichent de plus en plus un sac à la main sans que cela choque. Mais au Sénégal ce geste ne peut pas passer inaperçu, au regard de la pluie de critiques qui s’est abattue sur ce jeune chanteur[42], fin janvier 2016 lorsque sa photo avec un sac à main a circulé sur la toile. Même s’il a toujours été accusé par ces détracteurs de s’habiller comme les homosexuels à cause de son mode d’accoutrement féminin, en l’occurrence les pantalons serrés, les vestes de femmes, les ceintures et les chaussures serties de strass, le sac à main est cependant la goutte d’eau qui a fait déborder le vase dans un pays où l’homosexualité est toujours punie d’une peine d’un à cinq ans d’emprisonnement.

Le scandale a presque fait la une de tous les journaux du pays. Si L’observateur s’amusait d’un « Waly vide son sac », Le Témoin avait à sa une « Haro sur les homos et les sacs à main d’homme » avant d’enfoncer le clou « Waly a ouvert la boite de Pandore ». Pris en flagrant délit, le jeune chanteur a surtout heurté les autorités de la vie locale. Le communicateur traditionnel M. Mbaye Pékh s’en est mêlé en lui interdisant de porter un tel accessoire : « Un homme ne doit pas se vêtir comme une femme, encore moins avec un sac à main. Un homme peut mettre ses dossiers dans un cartable, à condition que ce soit un sac pour homme ». Dans une lettre ouverte appelant à la retenue et à la compréhension, son ami le chanteur Baba Hamdi n’a pas hésité à affirmer : « Il ne s’agit nullement de défendre l’indéfendable (…), il est vrai que Waly a ouvert la ‘boite de Pandore’ (…), à mon humble avis, on doit recadrer Waly »[43].

L’affaire est même devenue d’Etat, après que le magazine Jeune Afrique a publié un dessin satirique visant directement la confrérie des mourides à laquelle appartient le jeune chanteur. Le Président a condamné avec fermeté une « maladresse incompréhensible et inadmissible de la part d’un organe de presse qui s’identifie à l’Afrique et censé connaître, défendre et promouvoir la culture et les valeurs africaines.

Pour mettre fin à la polémique, le jeune chanteur qui avait pourtant assumé son accessoire en se décrivant comme une victime de la mode et en évoquant les exemples de stars américaines commeKanye West et Pharell Williams, adeptes du sac à main, décide finalement d’abdiquer en détruisant publiquement le sac. On dirait que ce n’est pas lui qui martelait sur RFI qu’il n’avait pas du tout l’intention de changer de style vestimentaire en affirmant que ce n’est pas la première fois qu’il portait un sac à main[44].

En 2012, il y avait aussi eu un scandale lors de l’élection miss Jongoma[45] avec la diffusion sur la toile des photos d’une des candidates qui s’est fait photographiée dans son jean leggins jugé trop transparent. La Brigade des mœurs avait été saisie pour attentat aux mœurs et outrage public à la pudeur[46].

Pour élargir le champ de la réflexion, je suis allé à la rencontre d’une vingtaine d’étudiants de l’université Assane Seck de Ziguinchor tout en ciblant ceux qui suivent la mode afin de leur poser quelques questions sur leur style vestimentaire. Et le constat est général : la plupart est victime de la mode de manière inconsciente, que ce soit les filles ou les garçons qui préfèrent dans la grande majorité arborer des vêtements serrés, des couleurs vives. Même les filles voilées ne sont pas épargnées par le phénomène de la mode, au vu des jeans ou des pantalons, des foulards de couleurs, du rouge à lèvres brillant. Le voile modernisé est actuellement de mise chez les jeunes filles. Et seule une infime minorité parmi elles, qui mettent le voile par conviction religieuse, ne suivent pas la mode pour passer inaperçues.

2. Mode et religion : le voile islamique et le voile « fashion »

Le port du voile est devenu, de nos jours, un effet de mode pour beaucoup de jeunes filles. En effet, quand certaines se voilent pour se conformer aux prescriptions de l’Islam, d’autres le font  essentiellement pour des raisons purement esthétiques[47].

Aujourd’hui, nombreuses sont les jeunes filles et les femmes qui mettent le voile pour des raisons esthétiques, contrairement à celles qui se voilent en suivant les recommandations de la religion musulmane. Nous avons délibérément choisi de ne pas entrer dans le débat sur le voile, la tradition et la religion afin de nous concentrer uniquement sur le propos de cet article visant à cerner la problématique du mode vestimentaire en milieu urbain en rapport avec l’éthique et l’esthétique. De toute façon, le voile par convictions religieuses ou le voile fashion sont diamétralement opposés au vu respectivement de la discrétion, de la pudeur et de l’ostentation ou du tape-à-l’œil. Autrement dit, les jeunes filles ou les femmes voilées par convictions religieuses ont tendance à cacher certaines parties de leurs corps pour ne laisser qu’apparaître le visage, les mains et les pieds, au moment où d’autres s’exhibent, la tête recouverte de voile ou à moitié voilée, les habits serrés, le rouge-à-lèvre brillant et les parures bien nouées[48].

Le voile fashion est actuellement un effet de mode très prisé par les filles dans la mesure où c’est un style beau qu’elles peuvent porter partout[49], selon elles. En tout cas, le voile religieux est maintenant concurrencé par le voile de la mode qui ne cesse de se propager. Résultat, le voile est banalisé dans la société : porter le voile jadis pouvait susciter la méfiance, la désapprobation ou le rejet de certains parents qui pensaient que c’était contraire à nos us et coutumes.

Enfin, le mode vestimentaire dans la société sénégalaise actuelle est caractérisé par la synthèse de trois cultures, en l’occurrence la culture traditionnelle, la culture occidentale et la culture américaine. Si la mode et le luxe épargnent une frange de la société, la plupart des cités religieuses en sont victimes.

 

3. Le mode vestimentaire des « bayy faal » ou Baye Fall

(…) La petite ville de Mbaké Cayor, (…). Ce lieu n’a pas été choisi au hasard. Il est très précisément le berceau du Mouridisme, là où le Cheikh Ibrahima Fall prêta allégeance au Cheikh Ahmadou Bemba Mbacké et reçu en retour une hache, acte fondateur et symbole de ce qui guiderait son action et celles de ses disciples : celle du don et du travail au service de l’homme, incarnation de Dieu sur terre. De ce guide spirituel est né le mouvement Baye Fall[50].

Coiffés de dreads et vêtus d’habits modestes bariolés à l’image de leur cheikh, les Baye Fall font prévaloir un nouveau projet  censé constituer la racine identitaire d’un projet de société[51]. Il s’agit d’un mouvement qui n’est pas basé sur les cinq piliers de l’Islam : ses membres en sont exemptés. Pour eux, le travail est le chemin de l’émancipation et de la dignité humaine. L’esprit de tolérance caractérise le baye-fallisme qui est un Islam ouvert basé sur l’acceptation de la différence, au moment où l’on évoque les frontières sanglantes de la religion. Peuplé par une très grande majorité de musulmans (95%), le Sénégal est un pays où les chefs religieux sont des régulateurs sociaux : les chefs religieux jouent un rôle prépondérant dans l’apaisement des tensions ou le règlement des conflits, grâce aux sollicitations des autorités et des acteurs politiques[52].

Conscients des défis du millénaire, les « baye Fall » initient la revitalisation de Mbacké Cayor, la localité de leur guide spirituel (Cheikh Ibrahima Fall), est un tournant dans la marche vers la révolution. Il s’agit d’une révolution basée sur le retour vers la nature, dans une zone presque désertique où sont construites des cases. Ils ont malgré tout réussi à y ériger un « périmètre agro-écologique »[53] qui marque ainsi l’harmonie entre l’homme et son environnement, et surtout la nécessité de combattre la désertification et l’appauvrissement des sols.  Leurs principales activités sont en effet concentrées dans cette localité pour freiner le fléau de l’exode rural, voire le phénomène de l’explosion des embarcations de fortune, grâce à l’éducation spirituelle, à l’enseignement et à la formation professionnelle. Cette éducation à la fois temporelle et spirituelle pourra, selon eux, permettre à la jeunesse de surpasser les contingences de la « vie moderne », puisqu’ils les encouragent à vivre dans la localité en leur garantissant des ressources économiques. C’est aussi une manière de contrecarrer l’exode rural qui ne cesse de gangrener le pays.

Ce qui est intéressant chez les « Baye Fall », c’est la révolution incarnée par un projet de société utopique, dynamique et expérimental centré sur le travail, la solidarité, la modestie, l’humilité, la frugalité, l’éducation théorique et pratique. Cependant, leur mode de vie simple dans un contexte de crise endémique a connu une très grande affluence de la part de beaucoup de jeunes gens parfois sans repères, déjà perdus dans les paradis artificiels.

Si la mode est bannie chez les « Baye Fall », il existe des cités religieuses comme Touba où les dégâts sont plus ou moins limités par une sorte de brigade des mœurs.

4. Le mode vestimentaire dans les cités religieuses : le cas de Touba et de Tivaouane

Le choix de ces deux cités religieuses se justifie par la quasi-inexistence de documents consacrés à ce sujet, même s’il s’agit des deux familles religieuses les plus représentatives au Sénégal. La ville de Touba et celle de Tivaouane sont respectivement la capitale des « mourides » et des « tidianes », deux grandes confréries séparées à peu près de 130 kilomètres. Toutefois, ce n’est pas le même climat qui règne dans les deux villes saintes. Les tidianes sont favorables au concept de laïcité : l’on y ressent beaucoup moins l’influence de la religion qu’à Touba[54]. Les symboles de l’État y sont mis en évidence à travers des écoles de la République communément appelées « écoles françaises », une gendarmerie et un Palais de justice. Pourtant tout n’est pas permis dans cette ville religieuse : les chrétiens n’ont pas obtenu l’autorisation d’y construire une église[55]. Quant à la cité religieuse de Touba, seules les écoles coraniques sont admises dans la ville. C’est la langue wolof qui y règne presque sans partage. Les chefs religieux traditionnels (les marabouts) y font la loi[56]. Le calife administre la cité[57] et les habitants ne paient ni impôts, ni taxes, ni factures d’eau, ni de frais de patente pour les taxis.

S’agissant du mode vestimentaire à Touba[58], les filles et les femmes se donnent du mal à contourner le code vestimentaire (le dress code) à cause de la brigade des mœurs, Safinatoul Aman (« cercle » ou dahira), en mettant des boubous chatoyants et hyper moulants, hijabs transparents ou richement brodés, maquillage savant et ongles hautement picturaux[59]. Safinatoul Aman veille, au jour le jour, au grain pour faire respecter les tenues décentes, quitte à humilier celles qui osent braver les interdits. A Tivaouane, il existe une ambiance beaucoup plus décontractée car on peut y voir des filles ou des femmes mettre une tenue vestimentaire « sexy » à faire tourner les têtes, sans choquer personne. Les jeans moulants et les tailles basses sont portés par les jeunes filles.

D’une manière générale, toutes les femmes ne sont pas voilées à Touba et à Tivaouane. D’autant plus que la femme sénégalaise tient aux canons de la beauté. En attestent les propos de Nelson Mandela[60] dans ses mémoires, en tant que grand amateur de la beauté féminine : Les Sénégalaises sont les plus élégantes de l’Afrique.

 

Conclusion

Le mode vestimentaire dans la société est soumis à une convention qui entrave la liberté de s’habiller par utilité et par commodité. Allant de pair avec le luxe, le masque, la superficialité, les apparences trompeuses, la mode est un frein contre l’éducation, les mœurs et les coutumes. En attestent les romans didactiques et les traités d’éducation du XVIIIe siècle. Même s’il ne s’agit pas pour le moment d’une analyse exhaustive de la situation depuis le XVIIIe siècle à nos jours, nous avons réussi à faire ressortir des coïncidences concernant le mode vestimentaire décrié par Rousseau et celui de la jeunesse mondiale, pour ne pas dire sénégalaise, à l’épreuve au mieux du mimétisme culturel et au pire de la mode qui va à l’encontre de nos mœurs et coutumes.

L’habit ne fait pas le moine. Et Rousseau prend le contrepied en disant : l’habit doit faire le moine. Et le moine ne doit pas être forcé à porter ses habits. Une manière de démontrer que l’homme doit avoir la liberté de s’habiller par commodité et par utilité, en battant en brèche le mimétisme culturel et surtout la mode sous-tendue par des fins mercantiles.

Puisque Paris symbolisait aux XVIIe et XVIIIe siècle la capitale de la culture  et de la mode, Rousseau la décrivait avec dégoût en sept mots : « Paris, ville de boue et de fumée »[61].

C’était une ville où l’on pouvait facilement s’embourber, à cause des mœurs légères pour ne pas dire des « noires mœurs » ou de la dépravation. Rousseau est l’auteur qui s’est le plus distingué dans la description dégoûtante de Paris des Lumières à travers ses écrits.

Quant au mode vestimentaire à l’époque contemporaine, Nous avons vu que l’accoutrement des jeunes gens et des adultes d’une manière générale n’est pas quelque chose de nouveau, puisqu’il existait déjà à l’époque de Rousseau et de Montengón. Et nous avons choisi deux scandales liés à une affaire de mœurs dans notre pays, en l’occurrence le fameux sac à main d’un jeune chanteur, le jeans leggin estimé « trop transparent » d’une candidate de « miss Jongoma» en 2012, avant d’examiner le mode vestimentaire des jeunes gens grisés par la mode de manière inconsciente dans la plupart des cas. Bref, la mode a fait des ravages dans le monde antique et classique, voire dans la société contemporaine.

 

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[1] Bernard GAGNEBIN, « ROUSSEAU JEAN-JACQUES - (1712-1778)  », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 2 mai 2016. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/jean-jacques-rousseau/

[2] Ibid., Bernard GAGNEBIN, « ROUSSEAU JEAN-JACQUES - (1712-1778)  ».

[3] Jorge LÓPEZ LLORET, PERVERSA SEGUNDA PIEL. ÉTICA, ESTÉTICA Y POLÍTICA EN EL VESTIDO SEGÚN JEAN-JACQUES ROUSSEAU, © Ediciones Universidad de Salamanca, Cuadernos dieciochistas, 11, 2010, p. 70.

[4] Stelio Cro, La utopía de las dos orillas (1453-1793), Cuadernos para investigación de la literatura hispánica, Nº 30, 2005, pp. 70-74.

[5] Voir Gaspar Melchor De Jovellanos, Obras completas, Tomo I, José Miguel Caso González, Colecciones de autores españoles del siglo XVIII, 1984, pp. 334.

[6] In Dame DIOP, L’espace dans le roman de Pedro Montengón, thèse de doctorat nouveau régime, Université de Nice Sophia-Antipolis, 2012, page 2.

[7] Ibid., p. 199.

[8] Ibid., p. 195.

[9] Ibid., p. 15.

[10] Ibid., p. 39

[11] Ibid., p. 70.

[12] In “Histoire des quakers”, article consulté le 29/08/2016 à 18h30 :

Vêtements

Comme tous les vrais chrétiens, les Quakers tiennent à la mise en pratique de leur foi. Au début de ce mouvement et pendant deux siècles, ils portaient des vêtements extrêmement simples et sobres, qui les distinguaient de leurs concitoyens, ceci dans le but d'éviter tout luxe inutile et de pouvoir donner plus d'argent aux pauvres. Mais aujourd'hui, tout en maintenant le principe de sa simplicité, ils s'habillent comme tout le monde.

http://quaker.chez-alice.fr/plus_histoire.htm

[13] Denis COLOMBI, « MONDIALISATION (sociologie)  », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 30 avril 2016. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/mondialisation/

[14] Éric LETONTURIER, « LA GALAXIE GUTENBERG, livre de Marshall McLuhan  », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 2 mai 2016. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/la-galaxie-gutenberg/

[15] Gisèle SAPIRO, « CULTURE - Vue d'ensemble  », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 30 avril 2016. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/culture-vue-d-ensemble/

[16] Abdallah Soidri, « Quand le sac à main d'un chanteur relance l'homophobie d'Etat au Sénégal », consulté le . URL : http://www.marianne.net/quand-sac-main-chanteur-relance-homophobie-etat-au-senegal-100240084.html

[17] Jorge LÓPEZ LLORET, PERVERSA SEGUNDA PIEL. ÉTICA, ESTÉTICA Y POLÍTICA EN EL VESTIDO SEGÚN JEAN-JACQUES ROUSSEAU, op. cit, pp-237-238.

[18] Ibid., p. 238.

[19] Ibid., pp. 238-239.

[20] Ibid., p. 239.

[21] Ibid., p. 252.

[22] Lire Dame DIOP, L’espace dans le roman de Pedro Montengón: Nous avons ici une tentative du lord visant à piéger Eusebio qui a reçu une éducation puritaine de la part de son maître Hardyl. Il lui a fait troquer son habit de quaker contre une tenue luxueuse, symbole de l’élégance, p. 261.

[23] Voir Eusebio, Pedro Montengón, Edición de Fernando García Lara, cátedra,

Letras Hispánicas, 1998, p. 606:« ¡Qué casa tan deliciosa, milord! ¿Quién es el dueño? ¡Qué perfilado rostro! ¡Qué perfilado rostro! ¡Qué ternura de juventud! ¡Qué gracias! ¡Qué atrayente afabilidad, mezclada de dulce insinuación y confianza! ¡Qué ojos! ¡Qué primor detalle y de presencia! Eusebio queda enajenado y encogido »

[24] Jordi Quintana Albalat « El Eusebio de Pedro Montengon: Una Antropología utópica », Revista de historia de la psicología, Vol. 17, Nº 3-4, 1996, p. 29.

[25] Rogelio Blanco, Pedro Montengón y Paret (1745-1824): un ilustrado entre la utopía y la realidad, Universidad Politécnica de Valencia, 2001, p. 208.

[26] Ibid., p. 226.

[27] Pedro Montengón (1745-1824), El Rodrigo, Edición de Guillermo Carnero, Letras Hispánicas, ©Ediciones Cátedra (Grupo Anaya, S.A.), Madrid, 2002, p. 141: (…) descubre un extendido erial (…).

[28] Ibid., pp. 143-144: (…) se despojó de sus ricos vestidos y adornos y se cubrió del humilde sayo (…).

[29] Ibid., p. 168.

[30] Ibid., p. 167.

[31] Ibid., pp. 170-171: (…) la corte (…), una pérfida morada, (…).

[32] Ibid., pp. 70-71.

[33] Joaquín Álvarez Barrientos, La novela del siglo XVIII, Madrid, Júcar, 1991, p. 284.

[34] Ibid., p. 238.

[35] Marti, Marc, Ville et Campagne dans l'Espagne des Lumières (1746-1808), Saint Étienne, 1994, Thèse de doctorat nouveau régime, troisième partie, chapitre 8 et 10, pp. 26-29.

[36] Ibid, p. 428.

[37] Ibid., p. 429.

[38] Ibid., p. 427.

[39] Jorge LÓPEZ LLORET, PERVERSA SEGUNDA PIEL. ÉTICA, ESTÉTICA Y POLÍTICA EN EL VESTIDO SEGÚN JEAN-JACQUES ROUSSEAU, Op. Cit, p. 252.

[40] Lire Fabbri, Maurizio, « Utopías posibles al acabar un siglo: Montengón y Thjulén »,

Homenaje a José Antonio Maravall / coord. por Carlos Moya Espí, Luis Rodríguez de Zúñiga,

Carmen Iglesias, Vol. 2, 1985, pp. 69-70.

[42] Lire marianne.net : Quand le sac à main d'un chanteur relance l'homophobie d'Etat au Sénégal, article consulté lehttp://www.marianne.net/quand-sac-main-chanteur-relance-homophobie-etat-au-senegal-100240084.html

[43] Ibid.

[44] Ibid.

[45] « Jongoma » : femme de forte corpulence. Miss Jongoma est le contraire de miss taille fine.

[46] Lire senxibar.com : Plainte contre Miss Jongoma 2012: le Procureur saisit la brigade des mœurs, article consulté le 9 Février 2013. Lien : http://www.senxibar.com/Plainte-contre-Miss-Jongoma-2012-le-Procureur-saisit-la-brigade-des-moeurs_a10245.html

[47] Rayhanatou DIALLO, ‘Mode et religion : Quand le voile ‘‘fashion’’ concurrence le voile islamique’, article cité le 28/09/2016 à 13h30. Lien : http://seneweb.com/news/Societe/mode-et-religion-quand-le-voile-lsquo-ls_n_162273.html

[48] Ibid. : Aussi, quant au port du voile comme effet de mode, Oustaz Matar clarifie: «Quand vous vous voilez, vous devez porter des habits décents, qui cachent vos rondeurs. Mais se voiler et faire du ‘‘Dangal’’, porter des habits serrés, c’est ne pas comprendre la religion et ce qu’elle dit du port du voile. C’est juste un effet de mode».

[49] Ibid.

[50] Valentine Van Vyve et Johanna De Tessières, « Les Baye Fall, voix méconnues de l'islam », sur www.lalibre.be, 31 mai 2015 (Article consulté le 22 septembre 2016)

Lien : http://www.lalibre.be/actu/movewithafrica/les-baye-fall-voix-meconnues-de-l-islam-5534c7e93570fde9b2cf7a15

[51] Ibid.

[52] Ibid.

[53] Ibid.

[54] Pierre Cherruau, Sénégal : Touba, la Mecque des mourides, article consulté le 23 septembre 2016 à 10h50. Lien : http://www.lemonde.fr/voyage/article/2010/12/13/touba-la-mecque-des-mourides_1452650_3546.html

[55] Ibid.

[56] Maïté Darnault, Sénégal: Mbacké et Touba, vice et versets, article consulté le 23 septembre 2016 à 17h00 : A l’entrée de la ville, une arche de béton peinte en vert marque l’amorce d’un bouchon monstre, et le début des interdits. Ici règne la loi des chefs religieux traditionnels, les marabouts. Chaque talibé (disciple) et sa famille choisissent de s’en remettre à un cheikh, qui les guidera dans leur vie quotidienne aussi bien que spirituelle. Au sommet de cette hiérarchie, le calife général des mourides, Sidy al-Mokhtar Mbacké depuis 2010. C’est l’un de ses prédécesseurs, Abdoul Ahad Mbacké, qui avait décrété, en 1980, dans une lettre au procureur de la République du tribunal d’instance de Diourbel, la prohibition sur son territoire «de l’ivresse, de la vente et de la consommation d’alcool, de tabac, de drogue, notamment le yamba [cannabis, ndlr], des jeux de hasard, de loterie, des vols et recels, des tam-tams, musiques de danse et manifestations folkloriques», ainsi que «tout ce qui est contraire à l’islam» - ce qui inclut de fait le cinéma, le football et le port du pantalon.

Lien : http://www.liberation.fr/planete/2015/01/25/senegal-mbacke-et-touba-vice-et-versets_1188440

[57] Ibid.: A Touba, la police et la justice dépendent de comités de vigilance, placés sous l’autorité directe du calife général des mourides.

[58] Ibid. : Le Magal a des airs de grand défilé en costume traditionnel, à mi-chemin entre le paseo espagnol et les circonvolutions autour de la Kabaa, à La Mecque.

[59] Ibid.

[60] Ibid.

[61] Voir l’article de P. Citron, La Poésie de Paris dans la littérature française de Rousseau à Baudelaire, Éd. De Minuit, 1961, pp. 99-103 ; Voltaire, Candide ou L’optimisme, suivi du texte apocryphe de 1760, par Jean Golzink, Texte et contextes, I.M.E., 1985, Magnard, pp. 237-239 : (…) Adieu donc, Paris, ville célèbre, ville de bruit, de fumée et de boue, où les femmes ne croient plus à l’honneur ni les hommes à la vertu. Adieu, Paris : nous cherchons l’amour, le bonheur, l’innocence ; nous ne serons jamais assez loin de toi.

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Radio Téhéran vs Nîrû-ye havâ’î : Deux modèles de culture de la musique féminine urbaine iranienne

Balle NIANE, Universite Assane SECK de Ziguinchor

 

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Résumé

Dans le monde de lIslam, Religion et pouvoir ne sont guère séparés. Ces deux domaines tendent toujours à maintenir le peuple sous contrôle. Si l’homme y bénéficie d’une certaine liberté, la femme elle, y est considérée comme étant sujette à la déviation dont les aspirations doivent être bridées. Certaines activités sont, de même, considérées comme suspectes et, dès lors, nécessitent un contrôle autant pour leur forme que pour leur fond. Parmi ces activités, la musique trouve une place de choix. Subissant pendant très longtemps de nombreuses injustices et ayant souvent été persécutée, la musique iranienne, plus particulièrement la musique féminine,ainsi délaissée se trouvait dans une situation peu confortable qui eut des conséquences désastreuses quant à son évolution. Cest ainsi que cette culture musicale perd de plus en plus de place, du moins sous son aspect savant, au profit d’une musique dite « populaire et vulgaire » et les savants de cet art ne jouissaient daucune reconnaissance. Il a fallu ainsi attendre louverture de Radio Téhéran en 1940 pour que la musique soit considérée comme un élément incontournable de la culture iranienne.

Toutefois, cette Radio miroir de lIran en voie de modernisation et d’occidentalisation eut un net penchant pour la culture savante avec un certain rejet de tout ce qui est populaire. Mais à force de promouvoir cette musique dite savante destinée à l’élite urbaine, la Radio Téhéran se montra farouche vis-à-vis d’une autre musique urbaine dite populaire et vulgaire en persan « kûcheh bâzârî » qui signifie, « ruelle de bazar », soit « bas de gamme ». Cette musique trouva sa terre promise à la Radio de l’Armé de lair, Nîrû-ye havâyî. Cette radio fut tout à fait lopposé de Radio Téhéran. On n’y diffusait que des chanteuses et chanteurs populaires au registre vulgaire et souvent érotique. Elle devient très vite la radio vedette du peuple. Elle réussit à promouvoir une autre culture de la musique féminine urbaine iranienne, dite populaire.

Mots clés: Radio Téhéran, Nîrû-ye hava’î, kûcheh bâzârî, culture urbaine iranienne, musique féminine iranienne

 

راديو طهران مقابل راديو نيروي هوائي :مثلان نسويتان للثقافة الموسيقية الحضريةالإيرانية[1]

في عالم الإسلام غالبا ما يستحيل التّفريق بين الدّين والدّولة. والسّبب في ذلك هو أنّ الدّور الأهمّ لهاتين القوّتين هو إبقاء الشّعب في الطّاعة و منعه من التّصرفات الخارقة لحدود العرف و التّقاليد المتداولة. إذا فرضنا أنّ الرّجل يتمتّع في مجتمع كهذا ب «حرية مقيدة» نوعا ما٬ فإنّ المرأة ليست ممّن تحتل الصّدارة حتى إن مكانتها لا تساوي بل لا تقارب مكانة الرجل ولا سيما في المجتمعات التقاليدية «الأبوية»في بيئة كهذه٬ تعتبر المرأة غالبا كمخلوقة مجبولة على الخطإ والعصيان؛ يجب أن يُكبح جموح طموحاتها الدنيئة. وهكذا وجدت أعمال مشكوك فيها محكوم عليها المراقبة الدائمة سواء أكانت من ناحية الشكل أم من ناحية المحتوى. ومن بين هذه الأعمال٬ تحتل الموسيقى الصدارة. في مثل هذه الحالة٬ ينتظر أن تكون مزاولة الموسيقى محرومة كليا على المرأة ولكن بالعكس٬ كل العكس نجد أنّ أشهر أعلام الموسيقى والغناء في هذا العالم نسوة٬ ولم يمنح لإيران الخروج من هذه القاعدة. بالفعل٬ لقد مارست الإيرانيات الغناء و ضربن بالآلات الموسيقية منذ بدء تاريخ إيران ولا يزلن يغنين حتى في أيامنا هذه التي أغلقت فيها الحكومة كل الأبواب أمامهنّ. و هكذا  رأينا أنه يحق دراسة و تحليل الدور العالي الذي لعبته المرأة الإيرانية في تطوير غناء البلد و الشرق عامة. ولكن للأسف الشديد لم يعر النقاد اللذين كتبوا عن الموضوع أدنى أهمية للمرأة في هذا المجال. تكاد المكتوبات تختصر عن الموسيقيين والمغنين الرجال ولا تكاد تذكر المرأة إلّا لإيضاح علاقة بمغنّ شهير أو للإشادة بذكر هذا الأخير[2].

مهما كانت معلوماتنا و المطبوعات عن غناء المرأة الإيرانية محدودة٬ فلا أحد يجهل أن هذا الغناء كان يتناول مواضيع متعددة بتعدد المناسبات المعيّنة له. فكانت هناك أغنيات للولادة وأخرى للزفاف وأخرى للمراثي وأخرى لشكوى المحب أو للتعبير عن سعادة المحبين المجتمعين عند الخلوة. و يجدر القول بأنّ غناء ليلة الزفاف كان يحتل مكانا مرموقا من بين كل هذه الأغاني. «إذ توجد أغنيات للخطبة٬ وأغنية خاصّة للحَماة على وشك ملاقاة كَنَّتها. وهناك أيضا أغنية تصاحب تقديم الصّداق وأخرى مغنّاة عندما تذهب الخطيبة إلى الحمّام [قبيل الزفاف] وأغنيات أخرى كثيرة للوداع[3]». وكل هذه الأغنيات مختلفة تماما عن أغنية «المرأة-الأم» لولدها. لا ننس أنّ هذا المجال الأخير لا يختصر عن حاجات الطفل و تهدئته فقط بل يعبّر أيضا عن شكاوى الأم وعن آمالها في ولدها وعن أمنياتها فيه في تحقيق أحلامها عندما يكبر ويرنو له مستقبل زاهر. وقد تغنت المرأة مواضيع أجدّ من هذه من مشاكل المجتمع و ظلم الحُكّام والفقر وغصب الفقراء لإثراء الأغنياء

لأنها تعرضت لمدة طويلة لكل أنواع الظلم والجور ولأشدّ الاضطهادات، فقد وجدت الموسيقى الإيرانية في وضع غير مريح أحدث أثرا كارثيا في طريق تطوّرها وجعل منها حرفة منبوذة. ولهذا السبب أخذت هذه الثقافة الموسيقية تتراجع يوما بعد يوم٬ على الأقل في صورتها العلمية لتفسح المجال لنوع آخر من الموسيقى مطلق عليها صفة «شعبية و بذيئة، مبتذلة». فعلماء هذا الفنّ لم يكونوا يتمتعون بأدنى اعتراف ولا بأقل احترام حتى من قِبل الشعب حتى أنه كان يطلق عليهم اسم «مطرب» إذ لم يكن لموسيقاهم و غناءهم غرض إلا إطراب الحفلات ومجالس اللهو[4]. وقد بقيت هذي الموسيقى على هذا الوضع حتى افتتاح الراديو الإيرانية حيث منحت للموسيقى، بشكل عام، فرصة الاعتراف كعنصر لا يستهان به من الثقافة الإيرانية.

عند تأسيسه سنة ١٩٤٠ كان «راديو طهران» مرادف الحداثة و تجدد إيران. و هكذا وجد لهذه الإذاعة، مرآة إيران في طريق «التمدّن والتغرّب» ميل واضح «للثقافة العالمة»(laculturesavante) مع نبذٍ لكل ما هو «شعبي». ومن هذا المنظور، جُعل أول راديو بإيران في خدمة نشر «الموسيقى العلمية والعالمة» أي الموسيقى الغربية الكلاسيكية مثل «الأوبرا» والموسيقى الإيرانية التقليدية «موسيقى أصيل، رديف» المسبوكة على أوزان الشعر الفارسي البحت. بناء على هذا، فقد توقفت هذه الإذاعة المخصّصة للنُّخبة المثقفة على  بثّ برامج مخصصة لهذه الموسيقى المسلحة والمغنّاة في غالبيتها من قبل متخرجي المدرسة العالية للموسيقى التي أسسها علي نقي وزيري (١٨٨٧-١٩٧٩)[5]بطهران عام ١٩٢٣.

ومن أجل إبراز الثقافة الحضرية الطهرانية و الجعل منها ثقافة وطنية، عبّر رئيس الوزراء في تلك الآينة، أي حال افتتاح الإذاعة، عن رغبته في وضع الموسيقى فوق كل البرامج المبثوثة في هذه الإذاعة الوطنية الأولى[6].وعلاوة على الأخبار المبثوثة باللغات الفارسية والعربية والفرنسية والألمانية والروسية، لم تكن الإذاعة تبثّ غير الموسيقى الإيرانية مما سنح لها أن تصل إلى مرحلة راقية من الانتشار لم تبلغها قطّ في ماضيها. ولكن قبل أن نتكلم عن هذا الدور الأساسي نرى أن نعرض عليكم نبذة موجزة من تاريخ الموسيقى النسوية الإيرانية انطلاقا من الفتح الإسلامي عام ٦٥١ حتى افتتاح الإذاعة عام ١٩٤٠.

فيما يعني القرون الأربعة والنصف السابقة للفتح الإسلامي على إيران، قد بقيت المعلومات عن ممارسة المرأة المهنة الموسيقية والغنائية مبهمة جدا. ولكن على الرغم من هذا الإبهام، فإن الكتّاب بدأوا يتكلمون عن الرقاصة والمغنية والضاربة منذ المملكة الأخمنية (-٥٥٠-٣٣٠-) حتى الدولة الساسانية (٢٢٤-٦٥١).

في المرحلة التي تمتد من الفتح الإسلامي حتى قيام الدولة الصفوية (١٥٠١-١٧٣٦) في القرن السادس عشر لم يصل إلينا إلّا بعض أسماء مغنيات لم نعرف عنهنّ شيئا من ناحية القدرة الفنية. ولكن منذ باكورة سلالتهم اهتم خلفاء صفويون من أمثال شاه عباس (١٥٨٧-١٦٢٩) بالموسيقى و شجّعوا على الصَّنعة الموسيقية. على كل حال، لقد تغير وضع المغنين على مرّ الزمان ولم يعد الناس ينظرون إليهم، في أواخر الدولة الصفوية، إلّا كأفراد فاسدي الأخلاق لا عمل لهم إلّا إفساد الشباب. وقد نجد هذه الفكرة في كتاب جان شاردين (JeanChardin) الذي زار إيران في تلك الأزمنة. حسب قول هذا الرحالة الفرنسي لا تحترف الغناء والموسيقى {بإيران} إلّا نسوة مومسات و بغيّات[7]».

و هكذا بقيت المغنيات يحتلن أدنى دركة في المجتمع حتى سنح لهن حكام السلالة القاجارية (١٧٨٥-١٩٢٥) فرصة الاحتراف بكل حرية واحترام. و هكذا وجدت للموسيقى النسوية أهمية بالغة وحازت بمساعدة واضحة وصريحة من قبل الدولة؛ حتى لقد وجدت جوقات دولية للحفلات التي كانت تؤدّى في الحرم الملكي. مثلا تحت حكم فتح علي شاه (١٧٩٧-١٨٣٤) ومحمد شاه القاجاري (١٨٣٤-١٨٤٨)، وجدت فرقتان نسويتان مكونتان كل واحدة منهما من خمسين فردا. كانت الأولى تحت رعاية أرمنية تسمى مينا في حين أن الأخرى كانت تحت رئاسة يهودية تسمى زهره. كانت الفرقتان تسكنان في قصور الملك مع حرمه وتصاحبانه هو ونساءه في أسفارهم العادية[8]». على الرغم من أنها لم تكن تحتل منصب موسيقيي البلاط المسمين ب «عمله طرب خاصه[9]» أي المطربون الخاصون الذين كانوا يحيون المراسم الملكية، فقد كانت هذه الفرق المسماة ب «عمله طرب[10]» يتمتعون بمنصب «موظف» يدفع لهم دخل شهري.

تحت حكم ناصر الدين شاه (١٨٤٨-١٨٩٦) و ابنه مظفر الدين شاه (١٨٩٦-١٩٠٧) بدأت الموسيقى النسوية تأخذ بُعدا آخر. فقد شجع الأول تحرير المرأة عن طريق التعليم. الآن تستطيع المرأة، وإن كانت تنتمي إلى أسرة محترمة، أن تمارس الغناء والموسيقى دون أن تثير غضب أقاربها أو أن تجلب العار لأسرتها. وقد وافقت هذه الفترة هيمنة الغرب على البلاد. و دخلت آلات الموسيقى الغربية في فضاء الموسيقى الإيرانية وبدأ الناس يتكلمون عن «الموسيقى العالمة» للتعبير عن الموسيقى الغربية الكلاسيكية. و من أظهر نتائج هذا «التغريب» أن أصبحت الموسيقى الإيرانية الأصيلة القائمة على أساس الشعر الفارسي مهملة والموسيقى الغنائية المطربة مبتذلة و فاحشة.

وقد مثل انتقال الحكم من القاجاريين إلى أيدي البهلويين (١٩٢٥-١٩٧٩) نقطة تحول حاسمة في تاريخ دولة إيران وفي تاريخ موسيقاها أيضا. فعلا، قد شهدت هذه السنوات، حال انتقال الحكم بين السلالتين، تغيرات كثيرة كانت تهدف تجديد الوطن و «عصرنته» و إلى حد أبعد «تغريبه». و تبعا لإرادة ثائرة للتجدد، قد منح هذا الزمن للمرأة المزيد من الحقوق سواء أكانت من الناحية الاجتماعية أم من الناحية الرسمية والوطنية. وهكذا نالت المرأة المتحررة من القيود الاجتماعية والتقاليدية الحق في ممارسة الغناء والموسيقى، حتى أنها استطاعت أن تكسب إشادة عظيمة بالذِّكر و شهرة عالمية في بعض الأحايين بفضل هذا الفن. و لدراسة وافية للحالة الموسيقية تحت حكم هذه السلالة التي ملكت إيران لمدة ٥٣ سنة، يحسن تقسيم هذه المدة إلى فترتين تمتد الأولى من ١٩٢٥ إلى ١٩٤٠ أي من بداية حكم رضا شاه (١٩٢٥-١٩٤١) حتى تأسيس الراديو. أما الفترة الثانية فتشمل المرحلة ما بين تأسيس الإذاعة حتى الانقلاب الإسلامي عام ١٩٧٩. و تتركز هذه المقالة حول هذه الفترة الثانية من الحكم البهلوي.

لقد حصلت إيران على أول معهد للموسيقى لها بطهران سنة ١٩٢٣ وأطلقت عليه اسم «مدرسهء عالي موسيقى» أي المدرسة العليا للموسيقى. كانت الموسيقى الغربية تحتل المكانة المرموقة في هذا المعهد وكان المعلمون به أوروبيين. وبما أن إرادة رضا شاه كانت موجهة تماما إلى «تغريب» المجتمع الإيراني، فقد اعتمد كثيرا على تطوير الموسيقى الغربية في وطنه للوصول إلى غايته. إلّا أنه بسرعة فائقة، رأى مفكرون إيرانيون متخرجون من جامعات أوروبية من أمثال كلنل علي نقي وزيري، المتخرج من كليات موسيقية من جامعات فرنسية وألمانية، أنه بدلا من تعزيز الثقافة الغربية على حساب الثقافة الإيرانية، يجدر سعي الإيرانيين وراء إحياء ثقافة أجدادهم. وهكذا تحول دور المعهد العالي للموسيقى من نشر الثقافة الموسيقية الغربية إلى «بعث و تجديد» الموسيقى الإيرانية الأصيلة التي لا تبرح أن تصبح «الموسيقى الحضرية المدنية» للنخبة المثقفة[11]. وتتميز هذه الفترة الأولى للموسيقى البهلوية بارتفاع تأثر الموسيقى الإيرانية بالنمط الموسيقي الغربي. فكانت الموسيقى الأكثر شعبية هي «موسيقى البوب»؛ فإذا بالموسيقى الإيرانية التقليدية الأصيلة توجد في مأزق لا تستطيع أن تنافس هذا الضيف الطّمّاع خصوصا وأن الفئات المتوسطة والشعبية من المجتمع بدأت ترتاح إلى هذا النوع الجديد و تنضم إلى مستمعيه. بقي رضا شاه وفيا لمشاريعه في تجديد وطنه و شعبه. لذا بعد أن قام بالإصلاحات في جيشه ألغى الإدارة العامة للموسيقى العسكرية ووضع مكانها الإدارة العامة للموسيقى[12]». وكانت الموسيقى الغربية تتمتع، في هذه المنظمة، بكل اهتمام الهيئة المديرة. و بقي الوضع هكذا حتّى جعلت الأنشطة الموسيقية تحت رعاية وزارة الثقافة والفنون والإذاعة[13]. و للمحافظة على الموسيقى الإيرانية الأصيلة عملت الوزارة يدا في يد مع كبار علماء الموسيقى وحثتهم على تسجيل موسيقاهم إلى جانب تعليم فنّهم للجيل الجديد ذي المعرفة المحدودة من الناحية الموسيقية.

لقد اهتم «راديو طهران» منذ افتتاحه كثيرا بالموسيقى. وتظهر بكل وضوح عمق العلاقة التي تربط بين الإذاعة والموسيقى منذ ساعتها الأولى. في تلك الخميس الموافق ٢٤ أبريل ١٩٤٠ في الساعة السابعة مساء، ترأس وليّ العهد محمد رضا (١٩٤١-١٩٧٩) مراسم افتتاح الإذاعة برفقة وزراء المملكة بأزيائهم الرسمية إلى جانب وجهاء ومثقفي العاصمة[14]. وبعد أقلّ من عشر سنوات من افتتاحها (أي قبل ١٩٥١ حوالي ١٩٤٨) قد وصل عدد المغنين والموسيقيين بالإذاعة ٨٦ شخصا. ويجدر بالذكر أن الموسيقيين الموقعين على الآلات الموسيقية كانوا بجملتهم رجالا في حين أن أغلبية المغنين كانوا من النساء. ويمكن أن نذكر من بين هؤلاء النساء قمر الملوك وزيري، روح انگيز، دلكش، روح بخش، پروانه، تاج اصفهاني وغيرهنّ من كبريات مغنيات تلك العصر[15]. وحتى عام ١٩٥٣/٤، باستثناء بثّات من صفحات الغرامافون، كانت الإذاعة تبث كل برامجها بما فيها الموسيقية بشكل مباشر و كانت هؤلاء النسوة يجرين يوميا بإتقان خارق للعادة[16].

وقد أدى تأسيس المدرسة العليا للموسيقى الوطنية (هنرستان عالیه موسیقی ملی) في ١٩٢٨ بمساعدة الأستاذ روح الله خالقي إلى تطور تعليم الموسيقى في البلد. وكانت الفتيات مقبولات في هذه المدرسة بنفس الطريقة التي كانت تقبل بها الفتيان؛ وقد كنّ يمثلن نصف المتخرجين بشهادة نهاية الدراسة. فعلا:

«على حد قول منصور گلزاري، أحد معلمي المدرسة، انطلاقا من افتتاحها حتى السنة الدراسية ١٩٧٦/١٩٧٥ قد تمكنت المدرسة من تخريج ٢٢ فصلا بجملة ٢٠٩ متخرجا بشهادة في الموسيقى. كان المتخرجون يحصون ب ٤٤ شخصا مجازا لهم حمل الليسانس و ٤ بشهادة نجاح السنة الثانية. كانت الطالبات يشكلن أعلى نسبة في النجاح. مثلا، من بين ال٢٠٩ المتخرجين في هذه الفترة كانت الفتيات بعدد ١٠٣ أي ١/٢. هذا على الرغم من أن الفصل الأول بعد الافتتاح كان يحتوي على ٨ بنات و ١٨ فتى[17]».

من هذا الفصل الأول، فقط ٥ طالبات و ٦ طلاب تمكنوا من الحصول على شهادة[18]. على الرغم من أن نسبة الرجال والنساء المتخرجين من هذه المدرسة كانت متوازنة، لقد لاحظنا أنه حين النظر إلى الحياة الموسيقية كانت نسبة الرجال تفوق كليا نسبة النساء. والشرح الأكثر احتمالا يرجع إلى أسباب اجتماعية وعدم المساواة بين الرجل والمرأة فيما يخص حرية اختيار الحرفة في المجتمع الإيراني. على كل حال، قد تمكن اللاتي واصلن ممارسة الغناء والموسيقى أن يعتلين درجات الفن حيث وجدناهن في الراديو وفي التلفزيون في مختلف البرامج المبثوثة. ونجد أكثرهن في برامج «گلها» أي «الأزهار» الشهيرة.

لنشر هذه «الموسيقى العالمة» أقامت الإذاعة، تحت إدارة داود پيرنيا، سلسلة من البرامج أطلقت عليها اسم «گلها» ما يعني «الأزهار». فعلا، لقد بدأت هذه «الأزهار» تزهر في الإذاعة الوطنية يوم ٢١ مارس ١٩٥٦، أي يوم رأس السنة الإيرانية «نوروز» وواصلت في النّمو حتى ١٩٧٩ حيث قضت عليها حكومة الانقلاب الإسلامي[19]. وال«گلها» عبارة عن ١٥٧٨ برنامجا تجمع حوالي ٨٥٠ ساعة من الموسيقى الإيرانية في الإذاعة مغناة في أنماط متباينة. وقد وجدت ٧ برامج من ال«گلها» كلها تمثل الثقافة الحضرية للموسيقى النسوية الإيرانية. هاكم الآن تقديم موجز لهذه ال«گلها».

  1. «گلهاى جاويدان»: قد عرفت مغنيات مثل مرضية، پروانه، أو روح بخش في البرامج «گلهاى جاويدان» أي (الأزهار الخالدة، ١٥٧ برنامجا) و «گلهاى رنگارنگ»(الأزهار المتلونة، ٤٨١ برنامجا). كانت الأزهار الخالدة مخصوصة للشعر الإيراني القديم لتوطيد العلاقة بين إيران وإرثها الأدبي ولإحياء الشعر القديم وتحبيبه للناس كي يعرفوه ويتناقلوه.
  2. «گلهاى رنگارنگ»: أما «گلهاى رنگارنگ»، فكما يشير إليه الاسم، فقد كانت المواضيع متلوّنة بتلوّن الأساليب التي غنيت بها. كان يوجد بها غناءا قديما وآخر حديثا ولكن لا يوجد بها أبدا غناء شعبي أو مبتذل.
  3. «برگ سبز»: كان اسم البرنامج الثالث «برگ سبز» الذي يعني «الورقة الخضراء». وكان هذا البرنامج عبارة عن ٣١٢ برنامجا، يطول كل واحد منها ما بين ٢٠ و ٤٥ دقيقة. وكان مخصصا للترنم بالشعر الصوفي الفارسي.
  4. «يك شاخ گل»: اسم هذا البرنامج يعني «فرع زهرة»، ويحتوي على ٤٦٥ برنامجا طول الواحد ١٥ دقيقة. وكان كل برنامج مخصصا لموضوع معين أو لشاعر مخصوص ومتخصص في غرض معروف.
  5. «گلهاى صحرائى»:«گلهاى صحرائى» يعني «أزهار الصحراء» ببرامجه ال ٦٤ الطويلة من ١٠ إلى ٣٠ دقيقة. قد كان هذا البرنامج الذي ابتكره داود پيرنيا لمغنيته الزاهرة الموهوبة سيما بينا كما يقر بذلك بنفسه في الخطاب التالي :«قد ابتكرتُ (گلهاى صحرائى) لمجرد سيما بينا[20]». كان هذا البرنامج يقدم مجموعة من مختارات الأغنيات الفولكلورية وأغنيات أخرى قادمة من مختلف أقاليم إيران.
  6. «گلچين هفته»: وكذلك وجد برنامج «گلچين هفته» أي «زهرة الأسبوع». يشكل هذا البرنامج أكثر من مائة قطعة موسيقية، و كان يبث يوم الجمعة بعد الظهر. ويمكن القول بأنه كان برنامج «مغنية {نجمة} الأسبوع[21]».
  7. «گلهاى تازه»(٢٠١ برنامجا): قبل بداية هذا البرنامج المسمى ب«الأزهار الطازجة»،  لقد عرفت برامج «الأزهار» بجملتها فترة ركود عقب إحالة پيرنيا إلى التقاعد. وقد استغرق الأمر عدة سنوات قبل أن تتمكن هذه البرامج من النهوض تحت رعاية روح الله خالقي، جواد معروفي والشاعر هوشنگ ابتهاج الذي وُكّل بتجديد البرامج برمّتها. ومن بين المغنيات اللاتي لقين شهرتهن في هذه البرامج سيما بينا. و في «الأزهار الطازجة» التي بدأت عام ١٩٧٢ تحت رعاية هوشنگ ابتهاج المذكور آنفا، نجد مغنيات شهيرات مثل مرضية اشرف السادات مرتضايى بجانب نجوم جيلها الساطعات وأخريات أصغر منها عمرا ولا شأنا من أمثال پريسا و سيما[22]. وقد ساعدت هؤلاء المغنيات مع كبرياتهن من أمثال قمر وروح انگيز في إنجاز اكثر من ٢٠٠٠٠ أغنية مضبوطة ومؤرخة من هذه الفترة ومحفوظة حتى الآن في مكتبات الراديو[23].

في عام ١٩٧١ انفصلت الإذاعة عن وزارة الإعلام لترتبط بالمكتب الدولي للراديو والتلفزيون الإيراني (سازمان راديو وتلوزيون ملّي ايران)المؤسسة تلك السنة. ومن بين التغيرات التي حصلت نتيجة هذا الانفصال، انحلال «اوركسترا النساء». كان هذا الاوركستر مكوّنا من ١٨ امرأة. «كانت سيمين بهبهاني الشاعرة الغنائية، وصديقه شاهنيا الملحّنة وقائدة الفرقة، واشرف السادات مرتضايى المغنّية. وكانت هناك أيضا ١٥ ضاربة بالآلات الموسيقية أخريات[24]». ولا يخفى على أحد أن هذه الأسماء ليست إلا أخرى كبريات مغنيات الدولة البهلوية اللاتي، باسم «إصلاح الإخلاق»، أجبرتهن حكومة الانقلاب الإسلامي على الصّمت المؤبّد أو أسلكتهن سبل الهجرة والغربة.

ومن كثرة ما شجعت الحكومة هذه الموسيقى «العالمة» المغناة للنخبة الحضرية المثقفة، فقد اضطر راديو طهران أن يظهر في لباس عنف تجاه نوع آخر من الموسيقى الحضرية «شعبية ومبتذلة» بالفارسية «كوچه بازاري» ما يترجم ب«زقاق بازار» أي «رخيص ووضيع ومنحط». على الرغم من تشجيعات الحكومة للموسيقى الأصيلة، فقد بدأت الموسيقى التقليدية والأصيلة تفسح المجال شيئا فشيئا لهذه الموسيقى الشعبية المطربة. وكان ردّ الفعل أن بدأ مفكرون من أمثال ساسان سپنتا ينقدون غناء هؤلاء النسوة اللاتي، على حد قولهم، لا معرفة موسيقية لهن ولا موهبة غنائية ولكنهن، بالغش وعلاقات مشكوكة فيها بأولي الامر، يتصدرن البرامج الغنائية في الإذاعة و «يصمن آذان المستمعين[25]». وقد وجدت هذه الموسيقى أرض ميعادها في إذاعة جيش الهواء « راديو نيروي هوائي». على الرغم من أنها تابعة للجيش، فقد كانت هذه الإذاعة على عكس راديو طهران التي كانت في قبضة الطبقة الأرستقراطية؛ كانت هذه الإذاعة تبث كل الأغاني السافلة التي تتناول مواضيع عن الجنس وجور الحكومة و فقر الشعب الإيراني  لقد كانت إذاعة الشعب المكد والأميين.

في تلك السنوات كانت هناك محدوديات كثيرة تحول دون بث وإشاعة الموسيقى العامية والبازارية، لذا تأنف راديو طهران الرسمي من بثها وإسماعها الناس. وأيضا بمنظور ضبط وإشاعة الصفحات، لم يمل الناس إلى تسجيل هذا النوع من الموسيقى. لذا لجأ هذا الضرب إلى المقاهي والحوانيت الليلية ومجالس العرس والحفلات خاصة بالإضافة إلى حفلات وأفراح شارع سيروس لإشاعته. وفيما بعد، لعبت الكاباريات دور المشيع لهذا النوع المنبوذ. إلا أنه وجدت بعض الإذاعات من بين هذه أقبلت على بثّ هذه الموسيقى ونشرها وترويجها. ومن بين هذه الإذاعات، يمكن ذكر إذاعة «نيروي هوايي» وإذاعة أخرى تابعة للجيش والدّرك[26]. كان بالإمكان الاستماع إلى مغنيات ومغنّين عامّيين بمصطلح بذيء وغالبا شهواني. وهكذا أصبحت بأسرع من لمح البصر إذاعة الشّعب المختارة. وكانت تتغنّى فيها مغنيات مثل معصومة بروجردي المعروفة بمهوش (التي تشبه البدر)، آفت، شيرين، پريوش

لقد حكم المجتمع على أن مغنيات مثل مهوش مبتذلات وبذيئات وخارقات لقوانين المجتمع. بغضّ النظر عن ضخامتها ووجهها بملامحه الذكورية، فقد تبينت مهوش عن غيرها من المغنيات بإيماءاتها الجريئة والمتحررة التي غالبا ما ينظر إليها على أنها مبتذلة وفاحشة. بالإضافة إلى هذه الإيماءات المتحررة، تأكدت شهرة مهوش بمصطلحها الخبيث و«الوقح». في حين أن غيرها من مغنيات جيلها كنّ يتوقفن على التغني بالشعر الموزون في نطاق «الموسيقى العالمة» بمفردات علمية و صعبة الفهم، فإن مهوش كانت تخاطب الشّباب والشّعب الإيراني بلغة مألوفة ومفهومة من قبل الجميع، وكل هذا من خلال أغان غالبا ما تكون :«مشوبة بشيء من التّصاوير المثيرة جنسيا[27]». ومن خلال هذه الأغاني المغنّاة بلغة الشارع، لم تكن مهوش تعرب عن صعوبات ومشاكل المجتمع فحسب بل كانت تعبّر أيضا عن رغبات وأحلام هذا الشّعب المنسي.

مهما كانت مهوش مشهورة، فلقد كان نشر موسيقاها محدودا جدا من قبل راديو طهران. ولم يكن السبب في هذا يرجع إلى شخصية المغنية فقط، بل يرجع هذا النفور إلى سبب أن هذه الإذاعة كانت تعتبر هذا النوع من الموسيقى أقبح من أن تبث. نعم، لقد غنّت مهوش في راديو طهران لمدة ستة أشهر فقطلأنها لم تقبل اقتراح المدير الجديد لهذه الإذاعة الذي كان يفرض على مغنيات مثل مهوش القيام بامتحان مذلّ، أعرضت مهوش عن هذه الإذاعة  لتلحق بإذاعة «نيروي هوائي» حيث اكتسبت سمعة واسعة لم تكن لتصل إليها لو بقيت في راديو طهران المترفّعة عن هذه الموسيقى الشعبيّة. هكذا لم يكن للمغنين من هذا الصّنف إلا الصبر حتى افتتاح إذاعة «القوات الهوائية للجيش» كي يتمكّنوا من الاستماع بكل حرية إلى هذه الموسيقى «الشعبية والعامية المنبوذة». حقا، كانت هذه الإذاعة تبثّ في أغلب الأوقات برامج شعبية ونوعا من الموسيقى ترفّعت المحطات الإذاعية الأخرى عنها على أنها غير لائقة للبث ولا إسماعها لأناس متمدّنين. في كلمة واحدة، لقد كانت هذي الإذاعة، إذاعة الشّعب والفئات الشعبية ما جعلها ومغنياتها في وضع مناضل للتقليديين.

لقد أطلق محاربوا هذا النوع من الموسيقى على مهوش ألقابا مثل :«الصنم المعبود لفساق طهران»، «مغنية بذيئة، فاحشة ومبتذلة»، «مغنية الزنادقة والفسّاق والفاسدين والجُهّال والعيّارين»، «القنبلة الجنسية للموسيقى الإيرانية» و« مارلين مونرو الإيرانية». أمّا علماء الدين والمذهبيون، فقد رأوا أن طريقة رقص مهوش وغناءها وارتداءها الأزياء الضيقة والقصيرة مضاد للإسلام وسمّوها عاهرة وكلبة لاله زار». كل هذا بالإضافة إلى قول مهوش من لسانها أنا لا أجيد الغناء، ولكن أحسن التمثيل والتدلل جيّدا». مهما كان الأمر من غناء مهوش، فقد بقيت المغنية وموسيقاها في خيال الناس من أكبر «فضائح» إيران البهلوية حتى لقد كانت تلقب ب«المغنية الفاضحة»[28].

وبعد مهوش اشتهر مغنّون ومغنّيات من هذا الصّنف من أمثال آفت وآغاسي. ونجد بجوار مهوش مباشرة آفت (١٩٣٤-٢٠٠٧). ولأنها سلكت نفس الطريق الذي سلكته مهوش، فإنّ هذه المغنية تعرف في المكتوبات ك«الثانية الخالدة». فهي تلك التي لن تتمكن أبدا من أن تساوي مهوش ولا أن تقاربها، لا في مصطلحها ولا في سلوكها. ولكن بقي اسمها مرتبطا باسم مهوش إلى الأبد كممثّلتي الثقافة الموسيقية العامية والشعبية الإيرانية.

مهما كانت المغنية مهوش «مقرفة»، لقد تمتعت بدعم عدد كبير من مشاهير الفنّ الموسيقي بإيران من أمثال روح الله خالقي، سيمين بهبهاني، صادق هدايت، پرويز ناتل خانلرى، عبد الحسين زرّين كوب وغيرهم. وهكذا نجد أحد أكابر علماء الموسيقى ومفكري إيران في القرن الماضي، روح الله خالقي، يكتب في كتابه تاريخ الموسيقى الإيرانية:

«عندما تكون المرأة قادرة على الغناء الجيّد والرّقص الجميل، فقد بلغت مكانةَ الفنّان في هذا المجال. إنها تنتمي إلى المجتمع؛ولأفراد المجتمع كل الحق في أن يروا فنّها، وأن يستمعوا إليه ويستحسنوه. ما لأحدٍ ولأخلاقها الشخصية؟! هل أكون أنا كاتب هذه الجمل أو تكونون أنتم {قرّاءها} أو يكون سائر الخلق بلا عيب و منزّهين؟[29]».

وهكذا كتب مرتضى حسين دهكردي عن تطور هذه الموسيقى وإقبال الناس عليها :

«في البداية، كان هذا النوع من الموسيقى موضع توجه الطبقات الفقيرة والدنيئة من المجتمع. أما تدريجيا، أصبحت طبقات أخرى كثيرة من عشّاق هذا النوع من الموسيقى. وبدأت طبقة الكتّاب والشعراء والأساتذة، وبشكل أعمّ، طبقة المثقفين تدافع عن هذه الموسيقى الشعبية. وكانت أول ماعُرفت الموسيقى الشعبية باختلاف أنواعها مع مغنية تسمى مهوش. لقد كانت امرأة ضخمة تغني في مقاهي شارع ’’لاله زار‘‘ بطهران حيث اكتسبت سمعة واسعة و شهرة هائلة[30]».

 و أيضا سئل ايرج مهديان، أحد مغنيي الأغاني العامية و«زقاقيّي البازار» عن علّة استقبال الناس لهذه الموسيقى  وحبّهم لمهوش، فقال لأن هذه الموسيقى تخرج من بطن المجتمع، فإنها تقع على قلوب الناس. وعلاوة على ذلك، إن هذه الأغاني تحكي آلام الناس. أما السيدة مهوش، فهي أولى امرأة صعدت على خشبة المسرح وجاءت بحركات أخذت بقلوب الناس فأحبوها[31]».

لكل هذا، حين لحقت مهوش حتفها في ١٦ يناير ١٩٦١ في حادثة سيارة أُنير مكان الحادثة بشمعات ولمدة أسابيع طويلة. وكانت مراسم تشييع جنازتها في مقبرة طهران مسرح اضطرابات وأغان ومن اكثر المراسم ازدحاما بتاريخ طهران. بناء على هذه المعلومات يمكننا الآن القول بأنّ كل ما أتينا به في هذه المقالة يؤكد رسوخ قدم المرأة المغنية والموسيقية في تطوير الثقافة الحضرية الموسيقية في إيران الجديدة.

وأخيرا يمكن أن نختم المقالة بالإقرار بأن الغناء فنّ محبوب بقدر ما هو مذموم؛ وترجع هذه الكراهية إلى الخيال الاجتماعي كما ترجع إلى المبادئ الدينية على حد سواء. لهذا، اضطر العديد من أهل هذا الفن إلى إخفاء أنشطتهم الفنية على من حولهم تجنّبا للقمع وللعائدات الغير المرغوب فيها. على كل حال، «كان هذا القمع موجها أكثر إلى المغنية. إن الفتنة والإغراء اللذان تمثلهما شخصية القينة في الخيال الشرقي هو الدافع، بلا شك، لهذا النهي الذي حرم الرجل من التمتع بسحر غناء المرأة في إيران الراجعة إلى إصلاحات إسلامية[32]».

ولا يتوقف هذا النهي على المرأة المسلمة فقط. فقد حكم النص التلمودي على المرأة بالصمت حال مراسم العبادات وخارج بيتها بهذه الجملة:«صوت المرأة عورة[33]». وقد احتفظ الإسلام بهذا الميراث السماوي حيث نجد هذه الجملة كما هي في الحديث ولنفس الهدف. ولمراعاة هذا النهي، فقد حرّم القانون الإيراني غناء المرأة منفردة لجمهور من الرجال أو مختلط الجنسين. إلّا أنه يسمح أن تتغنى امرأتان فأكثر لجمهور من الرجال بشرط أن لا يعلو في هذه الحالة صوت واحدة على الأخرى. إلا أنه  لم ير القانون حاجة إلى منع استماع غناء الرجل من قبل المرأة بحجة أنه على عكس صوت المرأة الذي يوقظ الشهوة الجسدية، إن صوت الرجل الأجشّ الخشن لا قِبل له من التأثير على المرأة لإيقاظ رغبتها الجنسية. لكل هذه العوامل،  قضت حكومة الانقلاب الإسلامي  على عقود من الثقافة الغنائية الحضرية لموسيقى المرأة الإيرانية. واليوم، باستثناء بعض الفرق النسوية، لم يبق لمرأة الموسيقى الإيرانية إلا سلوك طريق المهجر. لذا نجد أنّ أكثر المغنيات الإيرانيات في عصرنا يعشن في الغرب وخاصة في الولايات المتحدة الأمريكية وفي ألمانيا. ويقمن، على غرار المغنين الرجال، حفلات موسيقية بصورة منتظمة في البلدان المجاورة لإيران مثل دبي، تركيا، أرمينيةكي يتسنى للإيرانيين المقيمين بإيران الالتحاق بهن والتمتع بموسيقاهن بعيدا عن رصد ومراقبة وزارة المعارف الإيرانية التي تقف لهن وللموسيقى بالمرصاد.

المراجع

المراجع العربية والفارسية:

توکا ملکی، زنان موسیقي ایران :از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴.

تيرداد قادري، موسيقي ايران در دورهء رضا پهلوی، مکتوب في ٢١/١٠/٢٠١٤ مقروء في ٢٨/٤/٢٠١٥ في الساعة ١٧:٢٥، http://tirdad.mihanblog.com/post/27

حبيب الله نصيري فرو، تاريخچهء تأسيس رادیو طهران (ایران)ومعرفی هنرمندان ان، علمی، طهران، ۱۳۸۳ (۲۰۰۴).

روح الله خالقي، سرگذشت موسيقي ايران، الطبعة الخامسة، طهران، انتشارات صفي علي شاه، ١٣٥٣ خورشيدي (١٩٧٤).

روح انگیز راهکانی، تاريخ موسيقى إيران، طهران، انتشارا پیشرو، ۱۳۷۷ (۱۹۹۸)، نسخة إلكترونية غیر مصفحة مختارة من الصفحات ٣١٧ إلى ٣٢٩.

زهره خالقی، آوای مهربانی :یادوارهء قمر الملوک وزیری، الطبعة الثانیة، طهران، دنیای مادر، ۱۳۷۹ (۲۰۰۰).

ليلى نيروز، نگاهی به تاریخ تحول موسیقی ایران از دوران پهلوی تا اکنون، النسخة رقم ٣٢٤٥ المؤرخ ب٢٧/٤/١٣٩٢ (١٨/٧/٢٠١٣)، المقروء في ٢٨ ابريل ٢٠١٥ في الساعة ١٧:١٣، http://mardomsalari.com/template1/News.aspx?NID=169062؛

مسعود نقره كار، «مهوش وفروغ»، الجزء الأول، ١٦/٠١/٢٠١٤ مقروء في ٣٠/٧/٢٠١٥ في الساعة ١٢:٣٦  من العنوان :  http://news.gooya.com/politics/archives/2014/01/173814.php

المراجع الفرنسية والانجليزية:

CHAOULLI Alain, Les juifs d’Iran à travers leurs musiciens, Paris, Harmattan, 2012.

CHARDIN Jean, Voyages en Perse, Paris, Phébus, 2007.

DURING Jean, Musiques d’Iran : La tradition en question, Paris, Geuthner, 2010.

LEWISOHN Jane, « Flowers of Persian Song and Music : Davud Pirniā and the Genesis of the Golhā Programs », in : Journal of Persianate Studies, n°, 1, 2008, pp. 79-101, [url] : www.brill.nl/jps, consulté le 31/08/2015 à 14h13.

MILLER Lloyd Clifton, Music and Song in Persia : The art of Àvâz, USA, The University of Utah Press & Curzon Press, 1999, 29.

NOOSHIN Laudan, “Prelude: Power and the Play of Music”, in: Laudan Nooshin, Music and the Play of power in the Middle East, North Africa and Central Asia, Burlington-Farnham, 1988.

PAKDAMAN Nasser, « La situation du musicien dans la société persane », in : Jean-Paul Charnay, Normes et valeurs dans l’Islam contemporain, Paris, Payot, 1966, (pp.325-342).

YOUSSEF-ZADEH Ameneh, «  The situation of music in Iran since the Revolution : the role of official organization », in: British Journal of Ethnomusicology, vol.9, t.2, 2000, (pp.35-61).

http://barbad218.blogfa.com/category/10

  « Big Girl – Iran’s Mahvash مهوش », [url] : http://sixpillars.org/2013/04/24/big-girl-irans-mahvash-%D9%85%D9%87%D9%88%D8%B4/, publié le 24/04/2013 par Sixpillarstoppersia, consulté le 20/07/2015 à 17h37.

https://fa.wikipedia.org/wiki/علینقی_وزیری

http://www.darvishkhanacademy.com/pages/view/59-سال_روزدرگذشت_استاد_کلنل_علی_نقی_وزیری.htm

http://honardastan.ir/2014/07/نگاهی-به-زندگی-هنرمند-عالیقدر-،-کلنل-عل/


[1]يرجى من القارئ أن ينتبه إلى أنّنا زدنا الحروف الفارسية « پ، چ، ژ، گ» عند کتابة أسماء أشخاص أو أماكن تحتوي على هذه الحروف. وأيضا رأينا أن نأتي بالمراجع الفرنسية والانجليزية كما هي بالحروف اللاتينية.

[2]  Laudan Nooshin, “Prelude: Power and the Play of Music”, in: Laudan Nooshin, Music and the Play of power in the Middle East, North Africa and Central Asia, Burlington-Farnham, 1988, p. 3.

[3]   Chaoulli Alain, Les juifs d’Iran à travers leurs musiciens, Paris, Harmattan, 2012, p. 242, « Il y a des chants es chants pour fêter les fiançailles, une chanson spécialement destinée à la belle-mère sur le point de rencontrer sa bru, une autre qui accompagne la présentation de la dot, une autre encore chantée au moment où la fiancée va au bain rituel, ainsi que divers chants d’adieu ».

[4] حبيب الله نصيري فرو، تاريخچهء تأسيس رادیو طهران (ایران) ومعرفی هنرمندان ان، علمی، طهران، ۱۳۸۳ (۲۰۰۴ ص.۹.

[5]علي نقي وزيري احد آبناء بي بي خانم استرابادي، مؤسسة أول مدرسة للفتيات. ينتمي إلى أسرة عريقة في الموسيقى. سافر إلى فرنسا حيث واصل دراسة الموسيقى ثم درس في معهد برلين العلي للموسيقى قبل أن يرجع إلى طهران حيث أسّس المدرسة العليا للموسيقى الإيرانية. للمزيد من المعلومات ارجع إلى  : https://fa.wikipedia.org/wiki/علینقی_وزیری ؛ http://www.darvishkhanacademy.com/pages/view/59-سال_روزدرگذشت_استاد_کلنل_علی_نقی_وزیری.htm؛    http://honardastan.ir/2014/07/نگاهی-به-زندگی-هنرمند-عالیقدر-،-کلنل-عل/ ؛

[6] حبيب الله نصيري فرو، تاريخچهء تأسيس رادیو طهران (ایران) ومعرفی هنرمندان ان، علمی، طهران، ۱۳۸۳ (۲۰۰۴)،  ص.۹.

[7] Jean Chardin, Voyages en Perse, Paris, Phébus, 2007, p. 140, « (cette profession) ne s’exerce que par les femmes prostituées et les publiques ».

[8]Nasser Pakdaman, « La situation du musicien dans la société persane », in : Jean-Paul Charnay, Normes et valeurs dans l’Islam contemporain, Paris, Payot, 1966, (pp.325-342), p.331, « Sous Fath’ ‘Ali Châh [(1797-1834)] et Mohamad Châh (Qadjar) [(134-1848)], deux troupes féminines, comprenant chacune une cinquantaine de membres, l’une dirigée par une Arménienne, Mīnā, et l’autre par une Juive, Zohreh étaient logées dans le harem et accompagnaient le roi et son harem dans leurs déplacements habituels ».

[9] Ibid., p.331, « Serviteurs de joie ».

[10] Ibid., p.331, « Serviteurs appropriés de joie ».

[11]    Ameneh Youssefzadeh, «  The situation of music in Iran since the Revolution : the role of official organization », in: British Journal of Ethnomusicology, vol.9, t.2, 2000, (pp.35-61), p.36.

[12] روح انگیز راهکانی، تاريخ موسيقى إيران، طهران، انتشارا پیشرو، ۱۳۷۷ (۱۹۹۸)، نسخة إلكترونية غیر مصفحة مختارة من الصفحات ٣١٧ إلى ٣٢٩؛ ليلى نيروز، نگاهی به تاریخ تحول موسیقی ایران از دوران پهلوی تا اکنون، النسخة رقم ٣٢٤٥ المؤرخ ب٢٧/٤/١٣٩٢ (١٨/٧/٢٠١٣)، المقروء في ٢٨ ابريل ٢٠١٥ في الساعة ١٧:١٣، http://mardomsalari.com/template1/News.aspx?NID=169062؛ تيرداد قادري، موسيقي ايران در دورهء رضا پهلوی، مکتوب في ٢١/١٠/٢٠١٤ مقروء في ٢٨/٤/٢٠١٥ في الساعة ١٧:٢٥، http://tirdad.mihanblog.com/post/27 « رضا شاه {} اداره کل موزیک قشون را منحل کرد و اداره کل موزیک را جایگزین ان ساخت».

[13]Lloyd Clifton Miller, Music and Song in Persia : The art of Àvâz, USA, The University of Utah Press & Curzon Press, 1999, 29.

[14]تيرداد قادري، موسيقي ايران در دورهء رضا پهلوی، مکتوب في ٢١/١٠/٢٠١٤ مقروء في ٢٨/٤/٢٠١٥ في الساعة ١٧:٢٥، http://tirdad.mihanblog.com/post/27; ؛ توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.۲۲۹ ؛ زهره خالقی، آوای مهربانی : یادوارهء قمر الملوک وزیری، الطبعة الثانیة، طهران، دنیای مادر، ۱۳۷۹ (۲۰۰۰)، ص. ۱۵۷ :«. بعد از خاتمه ساختمان و نصب فرستنده و استدیو، ایستگاه رادیو طهران ساعت 19 روز چهارم اردیبهشت سال 1319 خورشیدی در طهران (محل بی سیم قصر در جاده قدیم شمیران فعلی توسط ولیعهد وقت محمدرضا پهلوی با فشار دادن دکمه ای، گشایش یافت و برای اولین بار صدای رادیو به گوش مردم رسید».

[15]  زهره خالقی، آوای مهربانی : یادوارهء قمر الملوک وزیری، الطبعة الثانیة، طهران، دنیای مادر، ۱۳۷۹ (۲۰۰۰)، ص. ۱۵۸-۱۵۹.

[16]زهره خالقی، آوای مهربانی : یادوارهء قمر الملوک وزیری، الطبعة الثانیة، طهران، دنیای مادر، ۱۳۷۹ (۲۰۰۰)، ص. ۱۵۸ :« از سال 1332 شمسی برنامه های رادیو، گاه ضبط می گردید و تا قبل از آن برنامه های رادیوئی به استثناء لحظاتی که صفحات گرامافون پخش می گشت به صورت زنده اجرا می شد».

[17]   توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.۲۴۸-۲۴۹ « به گفتۀ منصور گلزاری یکی از أستادان هنرستان، هنرستان موسیقی ملی از زمان تأسیس تا حدود سالهای 1354-55 ه. ش. بیست و دو دوره فارغ التحصیل داشته که مجموعا دویست و نه نفر با أخذ دیپلم کامل موسیقی، چهل و چهار نفر با درجۀ لیسانس و چهار نفر با فوق دیپلم از هنرستان خارج شده اند. از میان اینان در صد زیادی را بانوان تشکیل می دادند. به عنوان مثال از تعداد دویست و نه نفر فارغ التحصیل آن دوره صد و سه نفر یعنی حدود2/1 فارغ التحصیلان، دختران بوده اند و یا اولین کلاس هنرستان موسیقی ملی در همان زمان تأسیس با حضور هشت دختر و نوزده پسر رسما تشکیل شد».

[18]  توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.۲۴۹.

[19]  للمزيد من المعلومات عن البرامج «گلها»، ينصح الرجوع إلى   توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، وإلى Jane Lewisohn, « Flowers of Persian Song and Music : Davud Pirniā and the Genesis of the Golhā Programs », in : Journal of Persianate Studies, n°, 1, 2008, pp. 79-101, [url] : www.brill.nl/jps, consulté le 31/08/2015 à 14h13

[20]   توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.٢٨٥.

[22]   توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.٢٣٢.

[23]   توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.٢٣٢.

[24]   توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.٢٣٥ : «هجده نفر از بانوان [...] ترانه سروده ی سیمین بهبهانی است، آهنگساز و رهبر ارکستر صدیقه شهنیا، خواننده ی ترانه اشرف السادات مرتضایی و اجرا توسط ارکستر پانزده نفره ی بانوان رادیو و تلویزیون ملی ایران …»

[25]   توکا ملکی، زنان موسیقي ایران : از اسطوره تا امروز، لوس انجلس، کتاب کورپ، ۲۰۱۴، ص.٢٣٣-٢٣٤: « اکثر خوانندگان زن ما، صدایشان فاقد استحکام و ملاحت زنانگی است [...] خود نیز می دهند که آنان نیز باعث آزار گوش است».

[26]مسعود نقره كار، «مهوش وفروغ»، الجزء الأول، ١٦/٠١/٢٠١٤ مقروء في ٣٠/٧/٢٠١٥ في الساعة ١٢:٣٦ من العنوان http://news.gooya.com/politics/archives/2014/01/173814.php

[27] Nasser Pakdaman, « La situation du musicien dans la société persane », in : Jean-Paul Charnay, Normes et valeurs dans l’Islam contemporain, Paris, Payot, 1966, p.342, « teintées d’un certain érotisme imagé ».

[28] « Big Girl – Iran’s Mahvash مهوش », [url] : http://sixpillars.org/2013/04/24/big-girl-irans-mahvash-%D9%85%D9%87%D9%88%D8%B4/, publié le 24/04/2013 par Sixpillarstoppersia, consulté le 20/07/2015 à 17h37.

[29] روح الله خالقي، سرگذشت موسيقي ايران، الطبعة الخامسة،المجلد الأول، طهران، انتشارات صفي علي شاه، ١٣٥٣ خورشيدي (١٩٧٤)، ص. «وقتی زنی خوب آواز خواند يا خوب رقصيد و در اين فنون به مقام هنرمندی رسيد، او متعلق به اجتماع است و همه حق دارند هنر او را ببينند و بشنوند و تحسين کنند. به کسی چه مربوط است که اخلاق خصوصی او چيست؟ مگر من خود که اين جملات را می نويسم يا شما يا ساير مخلوق خدا همه بی عيب و پاک و منزهايم؟

[30]مسعود نقره كار، «مهوش وفروغ»، الجزء الأول، ١٦/٠١/٢٠١٤ مقروء في ٣٠/٧/٢٠١٥ في الساعة ١٢:٣٦  من العنوان http://news.gooya.com/politics/archives/2014/01/173814.php : «در آغاز اين نوع موسيقی، طرف توجه طبقات فقير و فرودست جامعه بود، اما بتدريج بسياری از ديگر طبقات اجتماع مانند نويسندگان، شعرا، معلمان و بطور کلی اغلب روشنفکران، از دوستداران اين موسيقی شدند. موسيقی های مردمی، اولين بار با خواننده ای بنام مهوش شروع شد، او زن درشت اندامی بود که در کافه های خيابان لاله زار تهران خوانندگی ميکرد و به شهرت و محبوبيت عظيمی دست يافت»

[31]مسعود نقره كار، «مهوش وفروغ»، الجزء الأول، ١٦/٠١/٢٠١٤ مقروء في ٣٠/٧/٢٠١٥ في الساعة ١٢:٣٦  من العنوان http://news.gooya.com/politics/archives/2014/01/173814.php : «اين ترانهها چون از بطن جامعه بلند میشد، به دل مردم هم مینشست. مضافاً براين که اين ترانهها درد دل مردم بود. خانم مهوش اولين خواننده زن بود که روی صحنه آمد و حرکاتی کرد که به دل مردم نشست.»

[32] Jean During, Musiques d’Iran : La tradition en question, Paris, Geuthner, 2010, p.95, « la réprobation touchait encore plus les chanteuses. La fascination qu’exerce dans l’imaginaire oriental la figure de la courtisane chanteuse et danseuse (qayna) est certainement à l’origine de l’interdit qui, dans l’Iran réislamisé, priva les hommes du charme du chant féminin ».

[33]  Chaoulli Alain, Les juifs d’Iran à travers leurs musiciens, Paris, Harmattan, 2012, p. 243, « la prescription talmudique selon laquelle ‘‘la voix d’une femme est comme sa nudité’’ ».

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Poésie africaine et rap : que révèle Encyclopédie de Keur Gui ?

Assane NDIAYE, Université Assane SECK de Ziguinchor

 

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Résumé

Empruntant à la tradition orale nègre, les textes de l’Encyclopédie de Kilifeu et de Thiat, groupe Keur Gui, s’apparentent à l’esthétique poétique africaine. Il est chez les rappeurs une volonté notoire d’accorder au rap les allures d’un poème. Cet effort est confirmé par le choix propice de rimes. De plus, la parenté entre la poésie africaine et le rap de Keur Gui est attestée par le type du rythme qu’ils ont en commun : le rythme binaire.

Mots-clefs : Poésie- rap- rapport- rime-rythme

 

Introduction

La grande leçon que j’ai retenue de Marône, la poétesse de mon village, est que la poésie est chant sinon musique – et ce n’est pas là un cliché littéraire. Le poème est comme une partition de jazz, dont l’exécution est aussi importante que le texte. D’un recueil à l’autre, cette idée s’est fortifiée en moi ; et lorsqu’en tête de poème, je donne une indication instrumentale, ce n’est pas simple formule. Le même poème peut donc être récité – je ne dis pas déclamé – psalmodié, ou chanté. Tout d’abord, on peut réciter le poème selon la tradition française […]. On peut encore réciter le poème en s’accompagnant d’un instrument de musique […]. On peut, enfin, chanter vraiment le poème sur une partition musicale.[1]

Ici, Léopold Sédar Senghor, comme pour répondre à ceux qui lui reprochent de trop imiter des poètes comme Paul Claudel, indique que sa source première, ses influences primaires sont africaines. Elles viennent de son Royaume d’Enfance[2]. C’est avec emphase qu’il apporte cette précision. De ce fait, il cherche à attester que son poème est d’abord et surtout nègre. Il s’enracine dans sa tradition. Cet aveu du feu Président-poète est illustratif. En fait, il est révélateur du rapport poésie-chant. S’inscrivant simplement dans la logique de la conception originelle du poème, qui est mélodie, Léopold Sédar Senghor confirme ici la parenté entre les deux formes artistiques que sont la poésie et la musique. Fort de ce constat, nous pouvons juger opportun de nous intéresser, dans le cadre de cet article, aux liens existant entre la poésie noire et la musique africaine, plus précisément le rap du groupe Keur Gui.

Avant tout, nous reconnaissons avec Jacques Chevrier que les poètes noirs ont subi des influences multiples[3] . Toutefois, il serait presque inconcevable de ne pas admettre la spécificité de l’art nègre. C’est probablement pourquoi Léopold Sédar Senghor avertit : « Si l’on veut nous trouver des maîtres, il serait plus sage de les chercher du côté de l’Afrique »[4]. Dès lors, il convient de prendre en charge toutes les influences des poètes africains afin de comprendre leur poétique. Ainsi, les rappeurs sénégalais qui s’inspirent des chantres de la Négritude créent des textes rappelant l’esthétique poétique nègre. Les deux formes artistiques ont en commun un point. A ce sujet, étudiant ce qui lie le poème au rap, Julien Barret précise :

Ce qui, dans le rap, évoque volontiers la poésie […] c’est une conception particulière de la chose poétique, une façon d’envisager l’écriture comme un travail d’artisan. […] Etonnante coïncidence, car ce qui fait le style d’un rap aux yeux de l’amateur, c’est surtout la structure formelle, les rimes, le rythme… D’ailleurs, si le rap peut être apparenté au genre poétique, c’est en tant qu’il procède d’une technique de composition formelle exigeante […].[5]

Dès lors, un constat semble généralement partagé, ces deux formes d’expression artistique ont en commun une particularité qu’est la musique. Pour l’un comme pour l’autre, ils sont, en tout cas à leur début, créés afin d’être scandés. En vue d’apprécier ce rapport, il s’agira dans cette étude consacrée à l’analyse des similitudes des deux formes artistiques, de mettre l’accent sur un point autour duquel poème et rap se concilient : la musique. A cet effet, nous nous intéresserons tour à tour à la rime et au rythme.

A-    La rime 

La rime est définie par le Dictionnaire actuel de la langue française comme un « retour du même son dans la terminaison de deux ou plusieurs mots »[6]. Xavier Dumas et alii renforcent cette conception en apportant plus de décision. Ils écrivent : « La rime est la répétition d’un ou de plusieurs sons à la fin d’au moins deux vers qui se suivent ou qui sont à proximité l’un de l’autre »[7]. Nous pouvons alors retenir que la rime est une reprise identique d’un ou de plusieurs sons à la fin de deux vers proches, au minimum. La rime est surtout l’art d’écrire un poème. Ces diverses sonorités identiques contribuent à accorder au texte son charme, sa mélodie, sa spécificité. Effectivement, la rime est la beauté du poème. Attribuant à ce dernier sa caractéristique principale, elle reste un ressort non négligeable de la création poétique.

Par ailleurs, il est vrai que la poésie africaine, rarement versifiée, est écrite sous une forme libre. Néanmoins, il y a la volonté de la part de certains poètes de faire revivre leur influence poétique classique. C’est ainsi qu’ils n’hésitent pas, dans certaines productions, à écrire suivant une certaine forme versifiée, avec l’usage de vers réguliers. Une telle esthétique n’est pas exotique car les poètes ont surtout appris à écrire des poèmes à la suite de la lecture de textes poétiques français. Ce n’est pas alors étonnant de lire des poèmes qui rappellent la poésie française du XVIe siècle ou celle du XIXe. De cette forme d’écriture, nous intéressera la rime. Celle-ci se caractérise selon : sa qualité, sa richesse et sa disposition.

Nous comptons mettre l’accent, ici, sur la dernière caractéristique afin de prouver les similitudes entre la poésie africaine et le rap de Keur Gui. L’analyse portera alors précisément sur les rimes plates et embrassées.

  1. Les rimes plates

La rime est dite plate ou suivie lorsqu’il y a deux vers qui se suivent et se terminent par le(s) même(s) son(s). Elle est schématisée suivant ce modèle : AABB, AABBCC, etc. Les poètes et les rappeurs utilisent bien ce type de rime. Analysons alors quelques similitudes.

Aimé Césaire, chantre de la Négritude, est considéré comme un poète révolté. Restant fidèle à une poétique qui se veut indépendante de celle de ses lectures françaises, il choisit une écriture libre. Pourtant, dans cet extrait de son célèbre et contestataire Cahier d’un retour au pays natal, on peut relever des rimes plates. Citons ces illustratifs vers :

pour ceux qui n’ont jamais rien exploré ► rime pauvre  [e]

pour ceux qui n’ont jamais rien dompté

mais ils s’adonnent, saisis, à l’essence de toute chose ► rime riche [ʃoz]

ignorants des surfaces mais saisis par le mouvement de toute chose

insoucieux de dompter, mais jouant le jeu du monde ► rime riche [md]

véritablement les fils aînés du monde.[8]

Ou encore ceux-ci du poète togolais Paul Akakpo Typamm :

Ma sœur africaine au corps gracieux, ►rime suffisante [jØ]

Etalant ta beauté noire aux cieux

Sœur vigilante et prompte en cuisine ► rime riche [zin]

Laborieuse au champ et à l’usine,

Persévérante et courageuse en classe ► rime pauvre [s]

Avec des enfants grognons qui te laissent

Rythme et cadences, Edition Akpagnon, 1981.[9]

Nous constatons que ces deux poètes noirs font bien recours à des vers à rimes plates dans ces extraits. Il est clair qu’Aimé Césaire utilise le vers libre mais consacre un effort musical dans la composition du poème. C’est ainsi que nous pouvons noter des rimes suivies en [e] (vers 1 et 2), en [ʃoz] (vers 3 et 4) et en [md]. Il est évident que chez ce poète, pourtant révolutionnaire jusqu’à l’esthétique, la référence à la poésie classique est patente. Quant au poète togolais, il utilise des vers réguliers et atteste un désir de bien jouer avec une variété sonore. Dans le second extrait, il est aussi des rimes plates en [jØ] (vv. 1-2), en [zin] (vv. 3-4) et en [s] (vv. 5-6).  En fait, le choix de ces types de rimes est évocateur des influences occidentales subies. Ces dernières n’épargnent pas les rappeurs puisqu’eux-mêmes disciples des grandes plumes de la poésie noire.

Le groupe de rap Keur Gui confirme bien cette parenté esthétique. En effet, leur dernier album intitulé Encyclopédie est une parfaite illustration de ce rapport. Longtemps connu pour des albums aux titres à la fois incendiaires et artistiquement bien choisis, ce groupe de rap de Kaolack s’est toujours montré professionnel. C’est alors qu’ils choisissent des titres révélateurs d’un intérêt pour la langue française et d’une certaine maîtrise, avec des jeux de mots. On citer : « France à fric », « In Dependance », « Coup 2 gueule »… Cette stratégie leur vaut un succès national puis international. Avec intérêt, nous nous intéressons à leur Encyclopédie afin de prouver que Kilifeu et Thiat (les deux rappeurs du groupe) ont une écriture proche de celle des poètes africains.

Néanmoins, nous tenons à préciser que leurs textes sont essentiellement écrits en wolof. En fait, même s’ils admettent que le rap est d’origine américaine, et trouvant logiquement son charme en anglais, ils préfèrent rapper en wolof[10]. Comme toute bonne poésie orale, leurs textes foisonnent de rimes plates. Grâce à la transcription qu’en fait Kalidou Sy[11], nous en trouvons  presque dans chaque morceau.

Apprécions par exemple ces premiers vers à rimes suivies :

Hass yi, fène yi, wah you gnaw yi boul nangou mou wagni leu ►rime suffisante  [lØ]

Hokatal yi, door yi thi leu, bagnal mou weugni leu

Ande ak pastëf, moytou gnawtëf, faat seu nafsou ►rime pauvre  [u]

Guindi wat gni wédi tégui yone, na nga thi waslou

Goor dou ragal djafé djafé, dafey gnafé té dou djafté►rime pauvre [e]

Féhé djeufé li mou digué, meuneu dègue Jah Jeufé

Keur Gi. Encyclopédie, « Kilifeu Keur Gui aka kalachnikov khekh bou doul diekh ».

Nous proposons cette traduction :

Que ni les persiflages, ni les mensonges, ni les vilains propos ne te déstabilisent

N’accepte pas que les menaces, les bastonnades te déstabilisent

Sois courageux, évite les mauvaises pratiques, ignore les plaisirs d’ici-bas

Ramène sur le droit chemin les désespérés, fais-en ton combat

Un homme doit faire fi des difficultés, se battre et éviter les diversions

Il doit respecter sa parole afin de recevoir des félicitations

Référons-nous à présent ces seconds vers à rimes plates :

Je sais que ya ngui laal thi péte, djeufeu ndikol Kondom ► rime suffisante [ɔm]

Amago lo yoré doome

Fils na nga moytou vices, yène bi da diss  ►rime suffisante [is]

Yone bi da lisse, na nga moytou tarkhiss

Kouy door dou hath, Ass gor dou kath ►rime suffisante [tʃ]

Goor dou sath, goor dou feth

Keur Gui. Encyclopédie, « Alma noop »

Nous traduisons :

Je sais que tu baises secrètement, utilise le condom

Tu ne peux pas pour l’instant entretenir un môme

Fils évite les vices, la charge est lourde

Le chemin est glissant, évite les bourdes

Ne parle pas de tes projets, un noble ne ment pas

Un noble ne vole pas, un noble ne danse pas

Dans les passages ci-dessus, nous remarquons les efforts de versificateurs des rappeurs de Keur Gui. Imitant les poètes nègres, ils écrivent en vers libres tout en déployant une énergie afin de rimer. Cette volonté de rapper les conduit à chercher une harmonie musicale. Ainsi que peuvent le confirmer les deux extraits cités, les textes de rap du groupe Keur Gui sont riches en sonorités. Alors, les rimes plates se terminent en [lØ] (vv. 1-2), en [u] (vv. 3-4) et en [e] (vv. 5-6), dans le premier extrait. Dans le second, on a des rimes suivies en [ɔm] (vv. 1-2), en [is] (vv. 3-4) et en [tʃ] (vv. 5-6). D’ailleurs, les traductions en langue française proposées indiquent bien l’usage des rimes plates dans l’album de rap Encyclopédie de Keur Gui.

Il est clair qu’aussi bien dans les poèmes noirs que dans les textes de Keur Gui, il y a un travail nourri consacré aux rimes plates. De même, tout comme les poètes africains, les rappeurs de Keur Gui fabriquent des vers à rimes embrassées.

  1. Les rimes embrassées

On parle de rimes embrassées quand un premier et un quatrième vers ont des fins identiques au moment où on note une répétition de son(s) semblable(s) uniquement aux deuxième et troisième vers. Le schéma pour ces rimes embrassées est : ABBA. Fort de cette conception, nous démontrerons qu’il y a des rimes embrassées dans la poésie nègre et dans le rap de Keur Gui.

A ce sujet, nous pouvons retrouver des rimes embrassées chez le poète gabonais Georges Rawiri. Dans son poème intitulé « Le chant du Gabon », on peut lire :

Ô mon pays, suis ta course éternelle

Tout en gardant l’âme traditionnelle.

N’oublie jamais le chant du piroguier,

Du paysan dont fume le village, ► rime suffisante [aʒ]

Et du chasseur dans la forêt sauvage,

Et que l’ancêtre assiste le pionnier. ►rime suffisante [je]

Chants du Gabon, Edicef, Paris, 1975.[12]

Aussi pouvons-nous retrouver des vers à rimes embrassées chez le Malgache Jacques Rabemananjara. Dans ses Œuvres complètes, on peut noter ces vers :

Les sombres profondeurs du temple s’irradient.

Aurore en plein minuit ? Suprêmes incendies ?

Le Sanctuaire brûle et les colonnes d’or

sont prises de frissons de leur base à leur faîte. ► rime riche [fɛt]

Tout s’allume, et l’encens et les hymnes de fête

emmêlent leur envol sur le blanc corridor.[13] ► rime riche [dɔr]

Nous constatons que ces deux poètes font bien recours à des vers à rimes embrassées dans les extraits cités ci-dessus. Il est clair que Georges Rawiri et Jacques Rabemananjara emploient des vers réguliers rappelant la poésie classique du XVIIe siècle. Le premier fait des décasyllabes et le second des alexandrins. De ce fait, ils consacrent un net effort musical dans la composition de leurs vers. Chez le Gabonais, nous pouvons noter le recours à des rimes embrassées en [je] (vers 3 et 6) et en [aʒ] (vers 4 et 5). Quant au poète malgache, son choix de vers réguliers atteste son désir de bien jouer avec une variété sonore. C’est alors que dans sa strophe, il est un jeu de rimes embrassées en [dɔr] (vv. 3-6) et en [fɛt] (vv. 4-5). Disciples des grandes plumes de la poésie noire, les rappeurs de Keur Gui sont tout de même sous l’influence de la poésie classique.

Il y a bien chez Keur Gui cette envie de fabriquer des vers à rimes embrassées. Nous comptons illustrer cet aspect formel avec deux extraits. Voici le premier :

Dak multinationale bi, tek loho thi bus bi ►rime pauvre [i]

Djot neu gnou oubi enquête thi séni paradis fiscaux

Djeuli sou gnouy capitaux, féhé tagok fiasco ►rime pauvre [sko]           

Djot neu gnou tagok fo bi, dirigeants yi par commi

Keur Gi, Encyclopédie, « France à fric ».

Nous proposons cette tradition :

Renvoyer la multinationale, récupérer nos dus

Il est temps de mener des enquêtes à propos de leurs paradis fiscaux

De récupérer nos capitaux, de s’épargner les fiascos

Il est temps d’arrêter le jeu, de se débarrasser des parvenus

Le second extrait est le suivant :

Ma fille na nga tééye, foy seuy na nga fa sééye

Seu ndèye moussou leu faye, lii mou leu deey na nga koko faye ► rime pauvre [aj]

Fékhé ko roy, loy tog mou doye

Boul falé kou leu hoy, bou leu kène guiss nga djoy ► rime pauvre [ɔj]

Djeukeur moy seu waay, nek sa wérou waay

Keur Gi. Encyclopédie, « Alma noop ».

Nous proposons la traduction qui suit :

Ma fille soit patiente, sois une douce épouse

Ta mère n’a jamais été répudiée, suis ses conseils avec observance

Qu’elle soit ta référence, sois une femme serviable

Ignore ceux qui t’intimident, sois une âme étale

Ton mari est ton ami, ton soutien référence

Ainsi que peuvent le confirmer les deux extraits cités, les textes de rap du groupe Keur Gui sont pleins de musicalité. Dans le premier extrait, on relève des rimes embrassées en [i] (vv. 1-4) et en [sko] (vv. 2-3). Dans le second, on a des rimes embrassées en [aj] (vv. 2-5) et en [ɔj] (vv. 3-4). Les traductions en langue française témoignent bien de l’usage de rimes embrassées par les rappeurs de Keur Gui, que sont Kilifeu et Thiat.

En réalité, si les lecteurs ont un goût prononcé pour la poésie et le rap, c’est en partie grâce aux sonorités, aux mélodies, à l’harmonie qui s’y dégagent. Effectivement, la beauté des textes émeut les écoliers, les collégiens, les lycéens, les étudiants, les professeurs, les chercheurs, les critiques. Nous constatons alors, qu’aussi bien chez les poètes noirs que chez les rappeurs, qu’il y a un judicieux travail sur la forme. Il appert que la rime, qu’elle soit plate ou embrassée, constitue le charme des deux expressions artistiques que nous étudions ici. Elle accorde au texte poétique les mêmes effets qu’elle en attribue au texte rappé : la musicalité. Ainsi, ils parviennent à épater les lecteurs ou auditeurs. Les impressionnants arrangements témoignent des talents de créateurs des poètes africains et des rappeurs de Keur Gui.

Par ailleurs, il se trouve que, même si elles ne respectent pas toutes les règles de la versification, les productions poétiques des Noirs, en vers libres, des rappeurs en freestyle[14] ou à travers un texte, reposent sur la rime car le poème et le rap sont un « artisanat de la rime », pour reprendre une expression de Julien Barret. C’est sans doute ce constat qui mène Christian Béthune à affirmer à propos du texte rappé par exemple : « Dans la formulation des rappeurs, ‘’ rime’’ est souvent une synecdoque pour désigner le « rap » dans son ensemble ; rimer, c’est rapper […] »[15]. Le lien entre le poème et le rap reste alors étroit. Comme pour entériner le débat, Julien Barret écrit :

Ce qui, dans le rap, évoque volontiers la poésie […], c’est une conception particulière de la chose poétique, une façon d’envisager l’écriture comme un travail d’artisan. Tout comme les troubadours de langue d’oc et les trouvères de langue d’oïl, les rappeurs sont des forgerons de la rime.[16]

Tous produits de la tradition orale, poésie africaine et rap ont logiquement des points communs. Ce n’est surtout pas un hasard lorsque la rime se trouve être un point convergent puisque le chant doit son charme à sa mélodie. La rime accorde aux deux textes des sonorités spécifiques rappelant simplement le poème et ses origines. Afin qu’ils amadouent, qu’ils adoucissent, qu’ils charment, poésie nègre et rap doivent contenir des rimes, qu’elles soient pauvres ou riches, suffisantes ou léonines… La rime apparait de ce fait comme un propre du chant et par conséquent du poème noir et du texte rappé.

A l’image de la rime, le rythme demeure une spécificité à la fois de la poésie africaine et du rap.

B-    Le rythme

Le rythme c’est le mouvement, mieux la succession régulière. En poésie, elle renvoie à la cadence. Il accorde à un poème les caractéristiques d’un chant. Dans la poésie classique, il est déterminé par les divers accents du vers. En fait, c’est l’accent[17] qui confère à un vers sa mesure et cette dernière détermine le rythme qui peut être binaire[18] ou ternaire[19]. Il y a donc tout un enchainement pour arriver à une finalité : la musicalité. Néanmoins, précisons que les accents, déterminant aussi la nature du rythme, ne sont pertinents que lorsque les vers sont réguliers.

De ce fait, du moment où la poésie africaine et les textes de rap de Keur Gui sont écrits généralement en versets ou en vers libres, il ne serait pas possible de partir de l’emplacement des accents afin de le déterminer. Il est certes vrai que le rythme y est fortement présent mais il s’inspire de la tradition orale africaine[20]. Pour cette raison, il convient de partir de l’audition pour déterminer ce que nous concevons comme le rythme africain. Dans ce sous-point étudiant la similitude entre poésie nègre et rap de Keur Gui, nous nous intéresserons au rythme binaire.

Le rythme se trouve au cœur de la création poétique africaine. Il en est même sa quintessence, sa spécificité. Il prend la place de la rime. Procédé essentiel dans la poésie noire, il est vivant et séduisant. Mais qu’est-ce que le rythme pour l’Africain ? Léopold Sédar Senghor donne sa réponse dans Liberté I :

Le rythme c’est le choc vibratoire, la force qui, à travers le sens, nous saisit à la racine de l’être. Il exprime par les moyens matériels, les plus sensuels : lignes, surfaces, couleurs, volumes en architecture, sculpture et peinture : accents en poésie et musique ; mouvement dans la danse […]. C’est le verbe de Dieu, c’est-à-dire la parole rythmée, qui crée le monde.[21]

Le rythme est alors sacré car étant l’alpha et l’oméga de cette poésie. C’est l’élément le plus vital du langage : il en reste la condition première et le signe. Comme la respiration de la vie, celle qui se précipite ou ralentit, il devient régulier ou spasmodique suivant la tension de l’être, le degré et la qualité de l’émotion. Ainsi, le rythme, né des profondeurs de l’âme, module la pensée créatrice et s’épanouit dans l’œuvre poétique noire. Le poète sénégalais avoue toujours dans la même œuvre : « Je le confesse, je suis auditif. Ce qui me frappe, ce qui m’enchante, d’abord, dans un poème, ce sont ses qualités sensuelles : le rythme du vers ou du verset, et sa musique »[22].

Dès lors, il apparaît que le rythme occupe une place indéniable dans la poésie africaine. Etudiant l’esthétique des poèmes noirs en général et ceux de Senghor en particulier, Lilyan Kesteloot[23]  révèle que les versets s’alignent, sans arêtes, les mots s’y acheminent régulièrement sur un rythme ralenti. Ce procédé très sensible est perceptible, par exemple, dans les versets suivant de « Retour de l’Enfant prodigue » où le « creux » des sons graves s’oppose aux voyelles aigues – é, i, u – et aux consonnes « occlusives » - t, d, s - :

Je ressuscite la théorie de servantes sur la rosée
Et les grandes calebasses de lait, calmes, sur le rythme des hanches balancées

Je ressuscite la caravane des ânes et dromadaires dans l’odeur du miel et du riz. (« Le retour de l’enfant prodigue, VII »)[24]

Dans le court passage qui vient d’être présenté on perçoit la redondance de ces allitérations, signe alors d’une grande variété rythmique. En effet, pour rythmer ces versets « processionnels », le poète utilise souvent le procédé de l’allitération. Soit qu’il choisisse comme dominantes les arêtes des premières consonnes, comme les r, d du passage ci-dessus, soit qu’il insiste sur une seule consonne ou une voyelle.

Cependant, plus souvent, ce procédé s’anime tel un rythme de danse, singulièrement de cette danse typiquement africaine qui redouble le pas en sautillant, « un… deux » sur un pied, « un… deux » sur l’autre, comme d’ailleurs aime à le rappeler Senghor. L’extrait suivant en est une illustration :

Femme nue, femme obscure

Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fait lyrique ma bouche

Savane aux horizons purs, savane qui frémis aux caresses ferventes du Vent d’Est

Tamtam sculpté, tamtam tendu qui grondes sous les doigts du vainqueur

[…]

Femme nue, femme noire

Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’Éternel

 « Femme noire »[25]

 

Mentionnons cet autre exemple :

Lentement têtu, je n’eus jamais peur

De recommencer chaque fois que j’avais échoué

Lentement têtu, je n’eus jamais peur

De me relever chaque fois que j’étais tombé

Lentement têtu, je n’eus jamais peur

De rester fidèle aux miens, à mon pays et à moi-même.

Jules B. Sanon. « De ma naissance à ma mort », Regard intérieur, 1984.[26]

            

          Alors, les deux exemples indiquent que les poètes recréent le pas en redoublant ou en martelant les mots. C’est bien le rythme binaire. Dans le premier cas, le poète sénégalais se sert de la reprise de certains termes afin de créer le rythme : versets 1 (« Femme »), 3 (« Savane »), 4 (« Tamtam ») et 5 (« Femme »). Aussi arrive-t-il qu’il se sert d’allitération pour la même finalité. Nous le constatons au pénultième verset à travers le [s]. Dans le second extrait, le poète burkinabé se sert de la virgule (vers 1, 3, 5 et 6) et de l’assonance en [e] (vers 2 et 4) pour créer le rythme binaire. Inspiré de la tradition orale, le poème nègre est cadencé à deux temps.

            En outre, il est bien cette particularité dans les textes rappés de Keur Gui. Ce groupe de rap, ainsi que le révèle la transcription de Kalidou Sy, emploie le rythme binaire. En bons chanteurs et surtout pour être écoutés, ils ont travaillé de sorte à créer les mouvements capables de capter l’attention et de donner à leur musique une harmonie, une vibration. Chez eux aussi, on retrouve le « 1-2 » senghorien. Citons deux passages qui l’attestent. Voici le premier :

La guerre de Biafra, les diamants de Bokassa

Diplomatie secrète, blanchir haliss thi pète

Indépendance coup de bluff, coopération matt di euf

Hèhe yi mouy roumandatt, massacre Malgache

Keur Gi. Encyclopédie, « France à fric ».

Nous traduisons :

La guerre de Biafra, les diamants de Bokassa

Diplomatie secrète, blanchir l’argent de manière discrète

Indépendance coup de bluff, coopération qui bluffe

Les guerres qu’elle provoque, le massacre Malgache

          

Le second passage est le suivant :

Deum yeup sooy

Fomp seu djoy, paré enjoy

Boudé gnoune dou nooy

Thiah yi di booy, ko meuneu rooy

Yatt bi dou leu mooy

Dara dou dooy ni beutou looy

Gnoune leu boy yi rooy

Keur Gi, Encyclopédie, « Nothing to prove »

              

Nous proposons cette traduction :

Sorciers épuisés

Essuyer les larmes, s’apprêter à s’amuser

Avec nous ce n’est jamais tendre

Marquer des points, quelle que soit ta référence

Tu ne pourras pas échapper aux coups

On ne lésinera sur aucun moyen

Nous sommes les références des jeunes

            

            Ces deux extraits révèlent le recours au rythme binaire dans l’album de Keur Gui. Dans le premier, comme chez Léopold Sédar Senghor et Julien B. Sanon, c’est la sonorité et la ponctuation qui permettent de créer le rythme binaire. Ainsi, le rythme est régulé par [a] (v. 1), [ɛt] (v. 2) et [œf] (v. 3). A l’image du premier, dans le second extrait le rythme binaire est obtenu sous la base de l’emplacement de la virgule (vv. 2, 4) et celle de la reprise du son [ɔj] (vv. 2, 3, 5). Kilifeu et Thiat, comme s’inspirant des poètes nègres, créent le rythme binaire grâce à un jeu de répétition ou de parallélisme asymétrique.

Au demeurant, il appert que le rap est d’une façon générale bâti autour du rythme, que certains appellent aussi tempo[27]. Les rappeurs mettent beaucoup d’énergie dans leurs textes afin de faire sentir leur musique. C’est fort de ce constat que Julien Barret note :

Cette notion de rythme, consubstantielle à la forme poétique, le rap la retrouve, la réinvestit et lui rend tout son sens. Alors que la poésie classique est régie par une métrique régulière, la musique rap est cadencée par un battement de mesure, ce qui renvoie à l’essence même du rythme. […] Le rythme des morceaux de rap est souvent binaire, en 4/4 par exemple. Cette binarité rythmique confère au texte une structure fermée […]. Il faut non seulement écrire dans le cadre d’un rythme souvent binaire, mais il est également nécessaire de produire des rimes, et en grand nombre.[28]

Tout comme dans le poème, le texte de rap est sérieusement rythmé, surtout eu égard au constat ci-dessus. Il conviendra de ce fait, d’apprécier la binarité rythmique pour se rendre compte que les rappeurs sont des poètes. Le rythme binaire est admis par un critique de la poésie (Léopold Sédar Senghor) et un spécialiste du rap (Julien Barret) comme une particularité des deux formes artistiques que nous étudions ici. L’imagination des poètes et des rappeurs leur permet de donner un sens musical à leurs textes. Ainsi, ils parviennent à créer une véritable harmonie sonore.

Au total, la poésie africaine et le rap sont des textes qui contiennent bien le même de type de rythme : la binarité rythmique.

Conclusion

En dernière instance, force est de reconnaître que l’Encyclopédie de Keur Gi est aussi de la poésie africaine pure. Empruntant à la tradition orale nègre, les textes de Kilifeu et de Thiat s’apparentent à l’esthétique poétique noire. Tout comme chez les poètes, il existe une volonté notoire d’accorder au rap les allures d’un poème. Cet effort est confirmé par le choix propice de rimes plates ou embrassées. De plus, la parenté entre poésie nègre et rap atteint son paroxysme avec le type du rythme qu’ils ont en commun. Ce rythme, tant théorisé par Léopold Sédar Senghor peut être schématisé selon cette formule : 1-2. Il s’agit plus précisément du rythme binaire qui renvoie aux pas de danse, aux mouvements des batteurs de tam-tams. Les rappeurs de Keur Gi demeurent de fervents imitateurs des poètes africains et antillais. Leurs textes, dans la forme, gardent l’héritage de la tradition orale. Dans le fond, les similitudes avec la poésie africaine seraient plus patentes.

Bibliographie

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-       MATESO, Locha. Anthologie de la poésie d’expression française. Paris : Hatier, 1987.

-        PRUVOST-BEAURAIN, Jean-Marie. Dictionnaire actuel de la langue française. Paris : Flammarion et Quillet, 1985.

-       RABEMANANJARA, Jacques. Œuvres complètes. Paris : Présence Africaine, 1978.

-       SENGHOR, Léopold Sédar. Liberté I : Négritude et humanisme. Paris : Seuil, 1964.

-       ---------------------------------. Œuvre poétique. Paris : Seuil, 1990.

-       SY, Kalidou. « Encyclopédie de  Keur Gi » (Fascicule).


[1] Cf., Léopold Sédar Senghor. « Postface » des Ethiopiques : in Œuvre poétique. Paris : Seuil, 1990, pp. 172-173.

[2] Pour Senghor, l’enfance est un paradis et il n’a cessé de le prouver dans ses premiers poèmes. Cela inspire Geneviève Lebaud qui consacre un ouvrage à cette thématique : L. S. Senghor ou la Poésie du royaume d’enfance. Paris-Abidjan : NEA, 1976.

[3] « Parmi les raisons contingentes il convient sans doute de faire la part des influences qui se sont exercées sur les poètes de la Négritude. Nourris les uns et les autres de culture occidentale, et plus spécialement de culture classique […] les auteurs de Pigments, d’Ethiopiques et de Cadastre ont incontestablement reçu en commun le legs d’une tradition gréco-romaine […]. A cet héritage de la culture classique il faut ajouter l’influence exercée par les surréalistes français côtoyés et lus dans les années trente ». Cf., Jacques Chevrier. La Littérature nègre [1986]. Paris : Armand Colin, 2003, p. 57.

[4] Léopold Sédar Senghor. Op. cit., p. 163.

[5] Julien Barret. Le Rap ou l’artisanat de la rime. Paris : L’Harmattan, 2008, p. 131.

[6] Jean-Marie Pruvost-Beaurain. Dictionnaire actuel de la langue française. Paris : Flammarion et Quillet, 1985, p. 1006.

[7] Xavier Dumas [sous la direction de]. Français livre unique 1ère. Paris : Hatier, 2011, p. 401.

[8] Aimé Césaire. Cahier d’un retour au pays natal [1ère éd. : 1939]. Paris : Présence Africaine, 1990, p. 63.

[9] Locha Mateso. Anthologie de la poésie d’Afrique noire d’expression française. Paris : Hatier, 1987, p. 173.

[10] « L’une des premières touches particulières apportées par les rappeurs Sénégalais a été l’introduction des langues nationales à la place ou à côté de l’anglais. Ainsi dans leurs textes cohabitent le français, l’anglais et les langues nationales ou simplement africaines ». Mamadou Dramé. Analyse linguistique et sociolinguistique de l’argot contenu dans les textes de rap au Sénégal. Iaşi : Casa E. Demiurg, 2010, p. 55.

[11] Nous travaillons avec un fascicule de Kalidou Sy dans lequel il propose une transcription de l’album Encyclopédie du groupe de rap sénégalais Keur Gui.

[12] Locha Mateso. Op. cit., p. 121.

[13] Jacques Rabemananjara. « Vision ». Œuvres complètes. Paris : Présence Africaine, 1978, p. 103.

[14] « Originellement sensé désigner une improvisation orale scandée et rimée sur un beat [Mis en italique dans le texte initial], il en est venu à prendre le sens de texte écrit sans thème précis, d’inspiration libre, où le rappeur balance ses rimes […] pour l’impact de leur sonorité plutôt que pour la cohérence d’un message. Cf., Julien Barret. Op. cit., p. 51.

[15] Christian Béthune. Pour une esthétique du rap. Klincksieck, 2004, p. 98.

[16] Julien Barret. Op. cit., p. 130.

[17] En français, un mot porte un accent tonique sur la dernière syllabe ou sur l’avant dernière syllabe si la dernière comporte le « e » muet. Dans un groupe nominal, ou groupe verbal, le mot le plus important porte l’accent du groupe.

[18] Le vers suivant extrait de Phèdre de Racine est un exemple : « Tout m’afflige/ et me nuit// et conspire/ à me nuire ». Le rythme est binaire (3-3-3-3).

[19] Par contre, dans le vers suivant de Corneille, on parlera de rythme ternaire (4-4-4) : « Toujours aimer,/ toujours souffrir,/ toujours mourir ».

[20] « Tel reproche, à Césaire, de le lasser par son rythme de tam-tam, comme si le propre du zèbre n’était pas de porter des zébrures ». Cf., Léopold Sédar Senghor. Op. cit., p. 160.

[21] Léopold S. Senghor. Liberté I : Négritude et humanisme. Paris: Seuil, 1964, p. 211.

[22] Idem. Ibidem., p 335.

[23] Lilyan Kesteloot. Comprendre les poèmes de L. S. Senghor. Luxembourg : Saint-Paul, 1986.

[24] Léopold Sédar Senghor. Op. cit., p. 53.

[25] Idem. Ibidem., pp. 18-19.

[26] Locha Matéso. Op. cit., p. 50.

[27] « Le rythme, le tempo du débit, considéré en tant qu’il est « posé » sur le rythme de la musique et qu’il le complète. Il résulte de la disposition des accents d’intensité et de la quantité de chaque son émis, c’est-à-dire de la durée (longue ou brève). Le rythme, qu’on définit en versification comme le retour d’un accent, tantôt régulier, tantôt alterné, est ici envisagé dans son sens premier (musical), comme un battement de mesure. Au tempo de la musique se superpose celui de la voix du rappeur qui peut jouer à placer les accents en correspondance ou en décalage avec l’instrumental, selon que celui-ci accélère ou ralentit la cadence de son débit. Le rythme peut être rapide ou lent, régulier ou irrégulier, monotone ou varié, en correspondance complète, partielle, ou nulle avec la musique ». Cf., Julien Barret. Op. cit., pp. 167-168.

[28] Idem. Ibidem., p. 122.